Par Julia Itel – Publié le 07/09/2022

Dans l’acception actuelle, le paradis fait à la fois référence au jardin où ont été créés par Dieu le premier homme et la première femme, mais aussi au lieu où séjournent les morts. Mais qu’est-ce que le paradis exactement ?


Quelle est l’origine du mot « paradis » ?

Le terme « paradis » provient, à l’origine, du perse pairidaêza qui signifie une superficie entourée de palissades. Entré dans la culture sémitique, ce dernier est devenu pardès en hébreu pour désigner un verger, un parc ou un jardin arrosé et arboré. Il est alors synonyme de gan (« jardin » en hébreu) et d’éden (« steppe et délice » en sumérien). 

Dans la traduction grecque de la Bible – que l’on nomme « Septante » - gan a été remplacé par paradeisos. Puis, dans la Vulgate (version latine de la Bible), paradeisos a été traduit par paradisus et a servi, depuis lors, à désigner le nom du lieu où Dieu a créé le premier homme, Adam


Le jardin d’Éden, ou le paradis terrestre

Le paradis dans l’Ancien Testament

Dans l’Ancien Testament, le terme pardès n’apparaît que trois fois. Il est compris dans le sens de « verger » et représente un jardin cultivé par l’homme. Le passage le plus explicite est bien sûr la description du jardin d’Éden, dans le livre de la Genèse (Gn 2, 8 – 3, 24).

Après avoir créé le monde et l’homme, Dieu plante un jardin en Éden. Celui-ci est irrigué par un fleuve qui se divise en quatre bras et fournit une nourriture abondante grâce aux fruits délicieux qui poussent sur les arbres. Dieu interdit toutefois de manger le fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, sous peine de mourir. Dans le jardin, à côté de l’homme, résident aussi des animaux. Plus tard, la première femme, Ève, est créée pour tenir compagnie à Adam.
 

Éden ou le paradis perdu

Au milieu de cette nature abondante règne une atmosphère tranquille, paisible, où l’on ne connaît ni la souffrance ni la mort. Ce lieu primordial, qui renvoie au mythe des origines, est celui où règne l’harmonie à la fois entre Dieu et la création, mais aussi entre la nature (végétale, animale) et les hommes. En effet, Adam, le premier homme, est façonné à partir de la terre (adama en hébreu). Le jardin symbolise alors la relation d’alliance établie entre eux (l’homme doit jardiner la terre) mais aussi avec le Seigneur car, dans ce temps du repos, l’union entre Dieu et l’homme n’a pas encore été rompue.

De nombreux historiens s’accordent à dire que le récit de la Genèse a été écrit soit pendant l’Exil (597-539 av. J.-C.), soit à son retour (538-333 av. J.-C.). Loin de leur terre natale, avec une population et une culture éclatée, les auteurs ont sans doute souhaité forger une identité unique autour d’une histoire mythique, guidée par la main de Dieu. La Genèse raconte ainsi les origines du peuple hébreu, ce qui est commun chez les civilisations antiques. Le jardin d’Éden peut alors être le symbole de la Terre promise mais perdue, conquise et spoliée par les nations voisines.

À voir : Le jardin ou pourquoi quitter le paradis

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Influence des mythes mésopotamiens et grecs

Exilés à Babylone, les Hébreux ont donc été en contact étroit avec les mythes mésopotamiens. Dans le mythe sumérien d’Enki et Ninhursag, récit de la création de l’humanité, on trouve le même déroulé narratif que dans le récit de la Genèse : le dieu Enki crée Dilmun, une vaste terre fertile d’où jaillit l’eau, source de vie, et où règne une atmosphère paisible. Trompant son épouse, Ninhursag, en mangeant des plantes non comestibles créées par elle, il connaît alors la maladie, la souffrance et bientôt la mort. Mais Ninhursag revient sur sa décision et décide de pardonner à Enki et de le soigner. 

On peut également trouver des correspondances avec certains mythes grecs, comme celui de l’âge d’or, décrit dans Les Travaux et les Jours d’Hésiode (VIIIe siècle avant J.-C.) et repris par Ovide, dans les Métamorphoses. L’âge d’or est le temps qui suit la création de l’être humain et qui représente une époque d’abondance, d’harmonie et de bonheur. Il tend à désigner un passé mythique, une sorte de paradis perdu


Le paradis et l'au-delà 

Apparition de l’eschatologie

À partir du IIIe siècle avant J.-C., l’idée d’un jugement dernier déterminant le destin des défunts apparaît dans la littérature juive et, plus spécifiquement, dans la littérature apocalyptique. Ce genre littéraire, qui apparaît officiellement avec le livre de Daniel, sert à éclairer les crises sociopolitiques que traversent le peuple juif et à se projeter dans un temps futur où les promesses de Dieu se réaliseront.

À lire

L’Apocalypse

   
Ce discours sur la fin des temps s’appelle l’eschatologie. Il s’agit d’une perspective historique tournée vers un avenir transcendant : après une période difficile, marquée par la destruction et le chaos, Dieu interviendra - à travers la figure du Messie – pour libérer Israël, régénérer le monde, et faire accéder le peuple élu au royaume de Dieu


Le paradis dans le Nouveau Testament

Un glissement s’opère alors : le paradis terrestre devient le lieu de séjour provisoire où les âmes des justes, ceux qui n’ont pas rompu l’alliance avec Dieu (qui n’ont pas péché), attendent le moment de leur résurrection

Dans le Nouveau Testament, Jésus est présenté comme le nouvel Adam, celui venu réparer la faute originelle commise par le premier homme et ayant provoqué l’expulsion (l’exil !) du jardin d’Éden. Le terme « paradis » n’apparaît que trois fois dans le Nouveau Testament (Lc 23, 43 ; 2 Co 12, 4 ; Ap 2, 7). Ici, tel qu’il est employé, le paradis semble faire référence à un état présent que l’on doit cultiver pour préparer l’avenir : en se mettant dans la présence de Dieu, on se prépare à entrer au Royaume de Dieu. Suivre le Christ, c'est donc être déjà au paradis. 


Le paradis céleste : apports du christianisme

La première esquisse d’une distinction entre paradis terrestre et céleste apparaît dans le Livre de l’Apocalypse. Jean esquisse l’idée que toute personne exempte de péché, et donc considérée comme fils ou fille de Dieu, pourra vivre éternellement dans la « Jérusalem céleste ».

Décryptage : Qu’y a-t-il après la mort ?

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Cette notion est reprise plus tard par saint Augustin qui, dans La Cité céleste (achevée en 426), établit une distinction entre « paradis terrestre » et « paradis céleste ». Selon lui, il existe deux cités, l’une est terrestre et l’autre céleste. Elles sont à la fois distinctes et liées ; la cité céleste peut être présente ici-bas mais elle est en exil. Pour Augustin, le règne de Dieu n’est donc pas d’ordre terrestre ou temporel mais d’ordre spirituel. C'est au Jugement dernier que les justes (croyants) et les méchants (païens) seront départis : les premiers accèderont au royaume de Dieu et vivront dans le bonheur éternel ; les seconds brûleront dans le feu infernal. 

La pensée d’Augustin sera influente à plus d’un titre, notamment sur la croyance en un châtiment éternel en enfer ce qui deviendra dans les siècles suivants un dogme de l’Église catholique. 


Qui peut aller au paradis ?

Selon le père Yves Combeau, tout le monde a la possibilité d’être sauvé car toute personne ayant cherché l’amour de Dieu trouvera la béatitude et la réalisation de cet amour au paradis. 

Sous quelles conditions peut-on aller au paradis ?

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