Il y a dans les relations quotidiennes que nous entretenons avec nos proches des rencontres ou des événements qui sont porteurs d’avenir et qui ouvrent un chemin de promesses.
 Ainsi en est-il, par exemple, lorsque au fond de la prison, l’homme qui a l’impression que tout s’est écroulé pour lui, qui a le sentiment d’un grand naufrage, découvre, à force de dialogue et d’amitiés avec un visiteur ou un aumônier, un chemin qui s’ouvre en lui : chemin de réconciliation avec lui-même et découverte intime d’une nouvelle liberté intérieure qui se forge en lui, comme une nouvelle naissance.
 De tels moments dont nous sommes témoins dans la vie de nos frères sont des instants de grâce. Nous les accueillons comme des dons. Il ne s’agit pas de changements programmés ou volontaires. Ce sont des passages où nous sommes agis, portés par la force de l’Esprit. Peu à peu ou en l’espace d’un éclair, la brume se déchire et laisse émerger la cime, de nouveaux chemins s’ouvrent dan le coeur des pauvres. Une espérance renaît. L’avenir d’une vie renouvelée apparaît possible.
 Et pour peu que nous ayons été les témoins de telles ouvertures dans la vie de nos frères, et pour peu que nous ayons été les accompagnateurs fidèles et discrets de leur marche dans la nuit alors, nous recevons en retour une joie inexprimable : Qu’y a-t-il de plus beau que de voir un homme au creux même de son épreuve et de son désert intérieur, se remettre debout, reprendre confiance en lui-même, retrouver la paix et tremblant, croire en un avenir possible pour lui, car il se sait aimé.
 Tressaillements de joie annonciateurs d’un monde nouveau pour l’homme et pour tous les hommes… Jean-Baptiste a connu ces moments de grande intensité. Encore dans le sein de sa mère, il a participé à cette inoubliable rencontre entre Elisabeth et Marie. Il a tressailli de joie lorsque Marie s’est approchée à la Visitation, portant en son sein le Verbe fait chair. Héritier de l’espérance de tout le peuple de ces pauvres qui n’ont cessé d’attendre pendant des siècles que vienne enfin ce temps de justice et de paix, il a été le premier témoin du plus grand retournement de l’histoire des hommes. En toute vérité il a pu reprendre ces paroles du prophète Isaïe entendues dans la première lecture : " Je tressaille de joie dans le Seigneur, mon âme exulte en mon Dieu. "
 Oh certes il n’était pas la lumière. Il ne se prenait pas pour le grand Prophète. Il était comme le dit le cantique de Zacharie : " Le petit enfant qui doit marcher devant et préparer les chemins du Seigneur. "
 Mais sa voix a su rejoindre les hommes dans leurs déserts, désert des coeurs brisés, désert de tant de solitude pour préparer avec eux les chemins de la rencontre avec Celui qui seul peur retourner nos vies et relancer notre espérance : Jésus Christ Celui qui doit venir.
 A la fois par sa distance au désert et par cette extraordinaire clairvoyance prophétique il a su préparer les hommes de son temps à la rencontre avec le Messie.
 Il n’était pas la lumière, mais il portait sur son visage les reflets de l’aurore qui allait éclairer le monde. Totalement pauvre, entièrement libre de tout retour sur lui-même, il était tout tendu vers cet avenir de Dieu parmi les hommes, vers cet avenir des hommes dans la bouleversante rencontre avec le Christ.
 Et cette totale humilité l’a amené à se retirer, à s’effacer au seuil de la rencontre pour que ses disciples eux-mêmes puissent vivre en toute liberté ce mystère de leur nouvelle naissance en Christ.
 Il me semble que Jean-Baptiste a beaucoup de choses à apprendre à nos communautés chrétiennes aujourd’hui.
 Aujourd’hui encore tant d’hommes vivent dans de véritables déserts. Désert de ces grandes villes où l’on se perd dans l’anonymat d’une foule qui va et vient avec pour seuls points de repères les temples de la consommation et des loisirs. Absence de relations vraies lorsque le dialogue s’épuise au sein même des familles soumises à toutes les sollicitations du tapage médiatique.
 Désert à l’intérieur de soi-même quand on n’a plus de goût à rien et que nos raisons de vivre ont déserté notre existence.
 Désert du déracinement quand on a été obligé de quitter son pays, sa famille, son univers familier pour émigrer dans un pays où l’on n’est pas toujours bien accueilli.
 Une Eglise comme la vôtre, frères et soeurs de la paroisse Sainte-Claire de Vauréal, est à sa manière aussi une voix qui crie dans le désert.
 Après vous être longtemps rassemblés dans la salle des fêtes de l’Agora, vous avez voulu poser par la construction de cette église un signe visible au milieu de ce quartier.
 Vous avez voulu poser une balise, un phare, sur le chemin des gens de ce quartier pour ménager la rencontre avec Celui que vient apporter la lumière et la communion entre des frères.
 Ainsi bous êtes tous, à votre manière, des disciples de Jean-Baptiste, Eglise qui ouvre à l’Espérance, Eglise qui prépare les coeurs à la rencontre.
 Vous les catéchistes qui accompagnez les enfants dans la connaissance de l’Evangile et qui guettez, attentives, la petite réflexion ou le dessin qui montre que la parole de Dieu prend corps en eux. Vous les adultes qui accompagnez les jeunes et qui témoignez simplement par votre amitié et votre qualité d’écoute, que ces jeunes sont attendus par le Christ sur le chemin de leur vie, comme une lumière et une passion qui peut remplir une existence. Vous qui voulez faire en sorte que les personnes d’origine étrangère qui viennent habiter sur ce quartier se sentent accueillies fraternellement dans une communauté chaleureuse et priante, une nouvelle famille.
 Vous qui, dans une prière durable et assidue, êtes ces guetteurs de l’aube attendant le plus sûrement le Seigneur qu’un veilleur n’attend l’aurore !
 A votre manière vous redites aux gens que vous rencontrez : " Il y a parmi vous quelqu’un que vous ne connaissez pas. "
 Et par la qualité de votre accueil, par la force de votre communion fraternelle, par votre souci de rejoindre les pauvres, vous reflétez sur le visage de l’Eglise que vous formez, les lumières de l’aurore qui vient avec le Royaume du Christ.
 Vous êtes à votre manière, chemin pour la rencontre de vos frères avec le Christ. Et quand le Christ vient habiter quand il le veut, comme il le veut avec la force de son amour dans la vie des gens avec qui vous avez cheminé, vous vous tenez sur le seuil, humbles et pauvres témoins du mystère toujours saisissant de cette rencontre.
 Et alors vous entendez monter au fond de vous ces paroles de l’Apôtre Paul : " Frères soyez dans la joie… Rendez grâce en toute circonstance… c’est ce que Dieu attend de vous dans le Christ Jésus. " Car vous aussi vous êtes attendus par Dieu.

Références bibliques :

Référence des chants :

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