La lecture du Livre de Michée est suivie de la prédication Pasteur Lilian Seitz, pasteur de l’Église protestante unie de France.

Bien loin de nos façons de penser aujourd’hui, ce passage de Michée nous confronte à l’énumération de sacrifices. Des sacrifices qui peuvent aller jusqu’à l’impensable ; comme le don de son propre enfant. Ce qui nous interpelle d’abord, c’est au fond ce don, jusqu’à cette vie, qui est notre bien au combien le plus précieux.

Mais au-delà de ces sacrifices, c’est l’homme des temps de Michée qui s’interroge : Comment me présenter à Dieu ? Comment trouver sa présence ? Comment pourrais-je faire pour simplement le satisfaire et l’interpeller ? L’homme des temps de Michée agit ici, comme pour satisfaire ces dieux qui traversent les récits de l’Ancien Testament. Par ces sacrifices, l’homme se donne le plus possible pour mieux atteindre Dieu.

Toujours plus, comme l’illustre ces mots : « Des veaux d’un an », toujours plus jeunes. « Des milliers de béliers » : toujours plus nombreux. « Des quantités de torrents d’huile » : toujours plus abondantes. « Mon premier né, l’enfant de ma chair » : toujours plus extrême. Agir comme si ces sacrifices, ces actes religieux, allaient donner de l’existence à Dieu. Mais ces interrogations sont mises sur la touche, elles partent en fumée comme ces sacrifices par cette dernière phrase exprimant la volonté de Dieu, « ce que le Seigneur exige de toi : rien d’autre que respecter le droit, aimer la fidélité et t’appliquer à marcher avec ton Dieu. »

Selon ces paroles, Dieu n’a pas besoin de ces dons performances : toujours mieux, toujours plus, etc. La volonté de Dieu, ici, invite plutôt l’homme à vivre sa présence en agissant avec justice, en aimant la fidélité et en marchant humblement en accord avec lui. Inutile de s’incliner devant le Dieu de là-Haut. Il s’agit plutôt de choisir cette voie que nous propose Dieu afin de vivre pleinement sa présence ici-bas. Ce chemin viendra se remplir d’actes et de paroles humaines pour dire Dieu : c’est ainsi, dans le langage, dans notre langage que Dieu se donne. Nous sommes invités alors à marcher avec lui, en sa présence, sur nos terres humaines, sur les sols que nous foulons chaque jour. Nous sommes invités à marcher avec lui sur ces terres d’inégalités, afin que surgisse une justice équitable, marcher avec lui sur ces terres de haines, afin que naisse l’Amour, marcher avec lui sur ces terres de l’indifférence, afin que se construise la compréhension de l’autre.

Dans ce texte de l’Ancien Testament, les paroles du prophète Michée, homme de son temps, deviennent actuelles et viennent relire notre propre temps. Nous avons ainsi l’impression que Michée est un de nos contemporains et nous invite alors, en cette semaine de prière pour l’Unité des chrétiens, à ne pas vivre une religion du sacrifice mais une religion d’acte d’espérance, qui vient s’incarner dans la société. Ces paroles anciennes deviennent elles-mêmes Parole d’aujourd’hui, rejoignant ainsi les revendications prophétiques et les promesses d’Évangile.

Oui, dans ce passage de Michée, il y a déjà l’esprit du Dieu de l’Évangile planant à la surface de ces mots. « Marcher avec ton Dieu » : c’est l’esprit des Béatitudes nous appelant à surmonter les frontières de nos rites, pour marcher dans la voie du témoignage des prophètes. Cette voie nous mènera plus loin que nos pensées et nos espérances actuelles. Finalement, ce « plus » ici n’est pas le « plus » de l’homme révélé à travers les excès de sacrifices, mais le « plus » de Dieu qui accompagne l’Homme dans sa justice et dans sa fidélité, car c’est lui et lui seul qui s’est donné au monde et à notre humanité. Afin que le Royaume de Dieu puisse demeurer dans tous les cœurs et dans toutes choses. Amen.

La lecture de la Lettre de Saint Paul aux Galates est suivie de la prédication de Mgr Norvan Zacharian, primat de l’Eglise apostolique arménienne à Paris.

Frères et sœurs en Christ, ma joie est grande de me trouver en ce jour à vos côtés, à l’occasion de cette nouvelle Semaine de prière pour l’Unité des chrétiens, ici, à Marseille, sans doute la première ville de Gaule à avoir accueilli les premiers immigrants chrétiens venus d’Asie mineure. Je pense en particulier à saint Irénée, au 2e siècle et à Grégoire de Tallard, un saint arméno-provençal du 5e siècle.

Il y a près de 35 ans, alors que j’étais évêque des Arméniens de Rhône-Alpes, je participais pour la première fois à cette célébration, et depuis, et pas plus tard qu’il y a quelques jours à Paris, je n’ai jamais manqué cette occasion de marcher avec mes frères évêques, prêtres et pasteurs dans les pas du Seigneur, en priant avec eux, pour notre unité.

« Marcher », voilà un mot, un verbe, qui n’est pas étranger aux chrétiens que nous tentons d’être. Car en vérité, notre démarche commune n’est-elle pas de marcher dans les pas du Seigneur pour rechercher son intimité et la proximité de nos frères en humanité, qu’ils soient chrétiens ou pas ? Notre baptême commun, n’est-il pas le début d’une longue marche qui durera tant que nous vivrons, avec et vers, notre Créateur ? Et ne sommes-nous pas tous, comme chrétiens, des pèlerins, ontologiquement donc des « marcheurs de Dieu », témoins et glorificateurs du Seigneur au sein de sa création.

En entendant la voix du prophète Michée, comment ne pas faire souvenir de ce jeune homme dont l’évangéliste Matthieu nous dit qu’il était riche et souhaitait gagner la vie éternelle, et qui interrogeait le Christ sur ce qu’il devait faire pour y parvenir ? Jésus, après lui avoir demandé d’appliquer tous les commandements de Dieu, ce que le jeune riche prétendait avoir fait, lui recommande de renoncer à ses biens matériels pour les donner aux pauvres et pour le suivre : « Suis-moi » (Saint Jean 1, 23). Nous assistons là à une invitation très concrète à marcher avec lui, dans un but évident que tout le monde aura compris : pour « faire le bien et la Justice » et gagner ainsi son salut.

Plus que jamais sans doute, c’est aujourd’hui de bonté et de justice que notre monde à faim, tout autant que de pain. Et pourtant, on peut dire qu’aujourd’hui, comme il y a deux mille ans, s’engager dans les pas de Dieu, pour marcher avec lui, aimer la bonté et pratiquer la justice est tout aussi difficile. Et que dire de l’humilité, cette vertu devenue si rare dans un monde de « présomption absolue » où tout le monde sait tout au sujet de tout… Comme nous sommes loin de la sagesse de saint Isaac le Syrien qui, humblement, proclamait : « L’humilité est pour toute vertu ce qu’est le sel pour tout aliment. » Que ne nous inspirons nous pas de lui lorsqu’il affirme, qu’au contraire : « La présomption disperse l’âme dans la rêverie et l’amène à errer parmi les nuages de ses pensées, à parcourir ainsi toute la terre sans ordre et sans but, alors que l’humilité, au contraire, la rassemble dans le silence, l’amène à se concentrer en elle-même. » Ce n’est après s’être revêtu de cette vertu, au prix de cet effort, que l’homme peut, humblement, mettre ses pas dans ceux de son créateur et marcher avec lui.

Mais, vous le savez tous, frères et sœurs, le pessimisme est étranger au chrétien. Aussi, en ces temps d’individualisme exacerbé, d’indifférence généralisée, de recherche effrénée du gain et de toutes les formes d’égoïsme, mais en cette belle Semaine de prière pour l’unité des chrétiens, je voudrais que nous tournions nos pensées vers tous ceux qui, répondant à cette invitation du prophète Michée, à l’imitation du jeune riche de l’évangile de saint Matthieu, et dans une grande humilité, ont renoncé à tout pour suivre le Christ et faire justice, en s’engageant concrètement au service de leur prochain.

Prions en particulier pour ces milliers de chrétiens, hommes et femmes de toutes confessions, laïcs et religieux, engagés dans des organisations caritatives et humanitaires, ou plus simplement dans le cadre de leur ministère, qui, dans les pays en voie de développement et ici, en France, par charité, par amour, « marchent avec Dieu et font justice » en servant leur prochain, indépendamment de ses croyances et de ses convictions.

Que leur marche nous inspire, nous aussi, et qu’à quelques jours de la lumineuse fête de la Présentation du Sauveur au temple, la Chandeleur, qu’elle éveille en nous de nouvelles vocations de « marcheurs du Seigneur », en particulier chez les plus jeunes d’entre nous. Amen.

La lecture de l’Evangile selon Saint Matthieu est suivie de la prédication de Mgr Georges Pontier, archevêque de Marseille.

Cette page d’évangile a nourri et nourrit encore la vie d’un grand nombre de chrétiens, d’un grand nombre d’hommes et de femmes qui la lisent et la connaissent. On sait la fascination qu’elle a exercée sur Gandhi, Martin Luther King, Vincent de Paul, Mère Teresa et tant d’autres !
Elle met au centre la personne du petit, du souffrant, de l’étranger, du prisonnier, de celui qui est en manque de nourriture, de logement, de vêtement, de nation, de liberté, d’instruction, de santé.

Elle nous révèle que Dieu considère comme fait à lui-même ce qui est fait en faveur du plus petit et que nos vies trouvent là leur juste valeur à ses yeux.
Nos vies pèsent ce que pèse le poids des actes de solidarité, faits en faveur des plus petits, qu’elles recèlent.
Quelles exigences, quels appels, quels chantiers !

Cette page d’évangile est de celles qui peuvent nous empêcher de dormir aujourd’hui comme hier. Il n’est pas besoin d’en décrire plus avant les multiples correspondances dans nos vies, ici à Marseille, dans notre pays, dans notre monde. Nous les connaissons toutes. On peut quand même citer les besoins de ceux qui ont faim, qui n’ont pas de logement, de travail, de ceux qui sont malades ou prisonniers, des populations Roms ou des sans-papiers et autres migrants.
Nous nous engageons souvent, ensemble, fidèles des Églises et communautés chrétiennes, souvent aussi avec bien d’autres qui mettent le service du plus petit au cœur de leurs engagements.

Mais il faut nous émerveiller surtout du cœur de Dieu qui nous est ici révélé : non seulement il se fait proche des plus petits, mais il apprécie la vie de tout homme à son degré d’engagement au service des plus pauvres et non d’abord à sa piété ! La véritable piété envers Dieu est de commencer par vivre en frères ! Sa manière de regarder nos vies est ainsi universelle. Tout le monde y est considéré selon le même critère : la fraternité effectivement vécue !

Bien évidemment, dans cette description prophétique du jugement dernier, nous pouvons reconnaître la manière dont le Christ Jésus a vécu, proche des petits, plein de compassion pour les exclus et les rejetés. Plus encore, lui-même a endossé leur sort de multiples manières et tout spécialement à la fin de sa vie, si bien que le bon larron n’a pas eu de mal à le considérer comme un frère secourable. Et Jésus a promis pour lui ce que le Père allait faire pour lui et par lui : « Aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le paradis. »
Saint Augustin résume bien cet enseignement lorsqu’il dit : « L’amour de Dieu est premier dans l’ordre des préceptes. L’amour du prochain est premier dans l’ordre de la pratique ! » Cela ne veut pas dire que l’amour du frère dépasse et peut suppléer celui pour Dieu. Non. Mais il en est le fruit le plus sûr, le plus authentique, le plus réel, celui que Dieu produit et aime trouver dans la vie des croyants.

Puisons donc en lui la force d’aimer, d’aimer les plus petits de ses frères.

Références bibliques : Michée 6,6-8 ; Galates 3,26-28 ; Mt 25,31-46

Référence des chants :

Vidéos liées

Recevez chaque
semaine vos newsletters :

Les différentes newsletters