C’est une parabole. Parabole de la démesure de l’amour ! Il faut l’entendre avec le coeur pour en saisir le message apaisant.

Au commencement est le don. A l’origine est le don de Dieu, toujours premier. Don de la vie, débordant et inattendu, comme les largesses du roi de la parabole qui fait grâce à son serviteur d’une somme astronomique, des millions de francs.

Le coeur de Dieu, comme celui du Père de l’enfant prodigue, ne s’épuise pas à donner et à pardonner en supprimant toute dette. Comme le Samaritain d’une autre parabole, Dieu est « pris aux entrailles ». Entrailles maternelles qui offrent la vie et la redonnent quand tout est perdu. Il est « Dieu de tendresse et de pitié, lent à la colère, plein d’amour et de vérité », comme le chantent les Psaumes (86, 15 ; 103, 8 ; 145, 8). Et il nous donne et redonne « la vie, le mouvement et l’être », précise saint Paul (Actes XVII, 28).

Tout au long de l’Évangile, Jésus nous révèle ce Dieu dont la justice est miséricorde. Il fait briller son soleil sur les bons et sur les méchants (Matthieu V, 45). Il laisse le troupeau pour courir après la brebis perdue (Matthieu XVIII, 12-14 ; Luc XV, 1-7). Il paie autant l’ouvrier de la dernière heure que celui qui a travaillé tout le jour (Matthieu XX, 1-16). Pour lui, les derniers seront premiers (Matthieu XIX, 30 ; XX, 16)… Voilà le don toujours premier de sa miséricordieuse tendresse.

Mais à la miséricorde sans mesure du maître s’oppose l’attitude impitoyable du serviteur qui, pour une somme misérable, s’acharne sur son compagnon de travail. Il le traite de façon totalement inverse à celle dont il a été gratifié. Alors qu’il vient d’être pardonné, il oublie le pardon qui le fait vivre et le refuse à son frère.

Oublier le pardon que l’on a reçu et ne pas vouloir le donner, c’est oublier de vivre, c’est choisir la mort. Car, tôt ou tard, le refus de pardonner nous détruit. Et nous accusons Dieu et les autres d’injustice, alors que c’est nous-mêmes qui nous fermons à la source de vie du pardon.

Nous supplions la miséricorde pour nous, mais notre jalousie ne tolère pas que Dieu pardonne aussi aux autres et nous exigeons pour eux une justice assortie même de la peine de mort ! Nous méritons alors le reproche du maître : « Je t’avais remis toute cette dette parce que tu m’avais supplié. Ne devais-tu pas, à ton tour, avoir pitié de ton compagnon, comme moi-même j’avais eu pitié de toi ? »

Le don qui nous a été fait excède tous les dons. Il est par-don. C’est de cette source débordante que surgit notre foi dans le pardon des offenses… jusque dans l’impardonnable.

Pardonner, c’est se souvenir du pardon reçu pour vivre en l’offrant. C’est renaître. C’est ressusciter.

En cette église de La Chaize-le-Vicomte résonne, aujourd’hui et depuis neuf cents ans, le don et le pardon de Dieu. Ses murs, aux allures de forteresse, dressent ses arcs romans comme les bras du Père toujours ouverts pour le pardon. Dès l’entrée, à l’ouverture de l’Eucharistie, nous sommes accueillis par le don du pardon : « Que Dieu tout-puissant nous fasse miséricorde… et nous conduise à la vie. » Et Jésus va nous redire : « Vous ferez cela en mémoire de moi » (Luc XXII, 19).

Depuis neuf cents ans, plus encore, depuis deux mille ans bientôt célébrés en jubilé… notre histoire est mêlée d’infidélité et de fidélité, de mort et de résurrection. Peuple de pécheurs pardonnés, faisons mémoire du don de Dieu pour le laisser ruisseler en pardon, sur nos frères et sur le monde. Alors, nous pourrons prier en vérité notre Père : « Pardonne-nous nos offenses, comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés. »

Références bibliques :

Référence des chants :

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