Mais quand on n’aime pas ? Quand on a de la rancoeur à l’égard de quelqu’un ? Quand il nous apparaît que telle ou telle personne nous a causé du tort et qu’il faut qu’elle répare ? Eh bien on parle de "régler ses comptes" ! "Je vais lui régler son compte à celui-là" est aussi une expression que nous connaissons bien !

Le passage d’Évangile de ce dimanche nous plonge au coeur de cette expérience de l’amour et de la haine, de la générosité et de l’animosité, du pardon et de la rancoeur… Et il nous propose un chemin de libération, un moyen d’instaurer d’autres relations dans notre monde de conflits et de violence.

"Combien de fois dois-je pardonner à mon frère qui a fauté contre moi ? demande Pierre à Jésus. Sept fois ?" Pierre a fait la question et la réponse… Déjà il devine ce que Jésus va lui répondre. Car en disant "sept fois", il emploie le chiffre symbolique juif qui représente la plénitude. Le disciple sait que le Maître va lui répondre : " Il faut pardonner une multitude de fois, indéfiniment… ". Mais Jésus va trouver le moyen de surprendre encore Pierre quand il lui rétorque : "Pas sept fois, mais soixante-dix fois sept fois !".

Quand on a la mémoire de la Bible, on peut se souvenir d’un chant guerrier qui se trouve au chapitre 4 du Livre de la Genèse. C’est un des descendants de Caïn, Lémek, qui parle et qui annonce : "Caïn a été vengé sept fois ; Lémek le sera soixante-dix fois !". Dans sa réponse à Pierre, Jésus a exprimé sa volonté profonde, son projet peut-on dire : à la surenchère de la vengeance, Jésus veut opposer la surenchère du pardon ! A l’infernale spirale des "règlements de compte", il vient proposer la "libérante" spirale de la remise des dettes !

Pour être sûr d’être bien compris par ses disciples, Jésus raconté cette parabole du serviteur gracié qui se montre pourtant impitoyable à l’endroit de son compagnon. Chacun la retient et la comprend sans difficulté. Un homme qui a une dette immense, impossible à rembourser, implore son débiteur et obtient la remise totale de sa dette. Comblé d’une manière incroyable, cet homme va-t-il, à son tour, se montrer compatissant et miséricordieux à l’égard d’autres qui peuvent avoir une dette, même minime, envers lui ? On pourrait s’y attendre… mais l’homme gracié ne veut pas faire grâce à son tour. Et ce comportement va lui valoir d’être puni par son maître qui se trouve contraint de revenir sur sa décision bienveillante.

On peut certainement tirer plusieurs enseignements de cette parabole. A travers la figure du maître, Jésus veut d’abord nous faire comprendre la vérité de Dieu, la vérité du Père. Le Père céleste est celui qui pardonne sans compter, dont la miséricorde est infinie. Pour Dieu, il n’y a pas de péché impardonnable ! Mais ce Père veut pardonner… à la mesure dont nous sommes prêts à pardonner nous-mêmes. Voilà sa justice ! Sa bonté n’est pas laxisme et irresponsabilité : elle est puissance d’Amour, et cet Amour ne peut véritablement s’épanouir que s’il trouve une réponse identique de notre part. Cette vérité-là tient une place tellement forte dans l’esprit de Jésus, qu’il l’a incluse dans la prière qu’il nous a enseignée : "Pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés" !

Mais l’autre vérité profonde contenue dans cette parabole c’est celle-ci : si tu remets les dettes que l’on a à ton endroit, si tu pardonnes, eh bien tu y gagnes ! Eh oui, tu y gagnes un ami, tu y gagnes un frère ! Tu y gagnes d’autres relations avec les hommes tes frères ! Et tu y gagneras ton Ciel, l’entrée dès à présent dans le Royaume d’Amour !

Déjà le Livre du Siracide ( entendu en première lecture ) proposait le chemin du pardon comme chemin de salut : "Pardonne à ton prochain le tort qu’il t’a fait : alors, à ta prière, tes péchés seront pardonnés. ( … ). Ne garde pas rancune, pense à l’Alliance du Très-Haut et oublie l’erreur de ton prochain…".

Contrairement à ce que l’on peut penser au premier abord, nous avons tout à gagner à pardonner. Et plus la dette paraît in-remboursable, plus il y a à gagner à remettre la dette ! On le constate aujourd’hui dans les relations internationales. Il y a des pays tellement endettés qu’ils se retrouvent en marge du fonctionnement du monde. Comment les réintroduire dans le "concert des nations" ? Eh bien en leur remettant leurs dettes… En leur disant : "A partir d’aujourd’hui on repart à zéro"… Ca aussi c’est une expression bien parlante de notre culture : "Remettre le compteur à zéro !". Pour partir sur de nouvelles bases, il faut effacer le contentieux qui a précédé…

Pardonner n’est pas facile. Et demander nous-mêmes pardon encore moins, car cela implique que nous nous reconnaissions humblement coupables ! Tout ne peut pas, non plus, se pardonner " à la même vitesse ". Une fille violée, des parents dont l’enfant a été tué, des peuples humiliés… ne peuvent pas accorder rapidement leur pardon à ceux qui sont cause de leur malheur. Beaucoup de temps est nécessaire pour parvenir éventuellement au pardon dans ces situations. Il faut passer par un long chemin de guérison, de réparation, de restauration… Mais les fautes envers nous que nous avons du mal à pardonner, sont généralement bien moins graves que les horribles crimes que j’ai évoqués. Et c’est d’abord dans ces occasions-là que le Christ nous appelle à briser l’enfermement de nos rancoeurs, la prison de nos ressentiments, une certaine fascination du mal. Seule la bonté vous libèrera nous redit Jésus ! Soyez assez forts pour pardonner et vous trouverez la paix et le bonheur !

Références bibliques :

Référence des chants :

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