Dieu était sur la paille…

Aujourd’hui est un grand jour : Un jour symbole, un jour phare : à Rome, on referme la porte de l’année Sainte. Mais c’est un symbole, un signe, pas plus. En entrant dans le troisième millénaire avec cet Évangile des mages reçus par la famille de Jésus, le christianisme reçoit à nouveau sa vocation de religion ouverte à tous.

A Valréas, comme dans beaucoup d’églises, on déplace dans la crèche les mages en les rapprochant du " roi des Juifs ", l’enfant Dieu. C’est un geste symbolique.

Aujourd’hui est un jour phare surtout parce que c’est le premier dimanche de ce nouveau millénaire. Une date historique. Jésus Christ nous fait entrer dans le XXIème siècle de son histoire depuis sa naissance.

Il accueille dans sa maison du troisième millénaire les mages d’aujourd’hui : ces hommes qui ont vu se lever son étoile et qui viennent l’adorer. Car ce que nous avons lu dans l’Évangile ressemble à ce que nous vivons aujourd’hui, mais à notre échelle, en fonction des besoins et des questions qui sont les nôtres aujourd’hui.

Ces hommes se mettent en route en faisant confiance aux astres, c’est à dire à l’ astrologie : une démarche pas très rationnelle, à l’opposé du religieux. Certains de nos contemporains sont encore sensibles à ce langage ésotérique et ambigu qui s’appuie en bonne partie sur notre peur de l’avenir. Pour ne pas tomber dans cette fausse séduction, regardons de plus près ce voyage des mages de l’Évangile. De fait, ils ne partent pas sans bagage ni sans avoir fait des recherches : Ils ne cherchent pas quelque chose : le bonheur, la santé ou l’amour comme dans nos horoscopes – cette triste façon de s’aimer soi-même en recherchant ce qui nous valorise. Non, ils cherchent quelqu’un : " le roi des Juifs " et même " celui qui vient de naître ".. Ils ont consulté avant de partir des manuscrits anciens, probablement des rouleaux d’Isaïe laissés par des Juifs au temps de la diaspora et qui disaient " Elle est venue ta Lumière et la gloire du Seigneur brille sur toi " (…) " des gens t’apporteront l’or et l’encens " " : Ce même texte que nous venons de lire dans la première lecture de cette messe.

C’est probablement cela qui empêche leur recherche personnelle de devenir la poursuite d’un mirage : c’est en ce sens qu’ils peuvent nous guider car nous aussi nous cherchons le Sauveur ou des " sauveurs ". Dans cette recherche, comment nous appuyons-nous sur notre passé ? Ou au contraire, pourquoi nous cachons-nous ce passé ? Pourquoi en sommes nous comme amnésiques ? Nous appartenons à une histoire, une histoire sainte qui n’a pas commencé le jour de notre questionnement. Dieu a déjà parlé aux hommes : à chercher Dieu dans notre imaginaire seul, nous trouverons le Dieu de notre imaginaire : le Dieu de nos peurs, pas le Dieu de nos Pères.

Les mages eux-mêmes s’appuient en arrivant à Jérusalem sur la recherche d’autres : Ils commencent par interroger le peuple de l’Ecriture, le peuple juif. " Où est le roi des Juifs ? " Ces mages ne savent pas bien qui ils interrogent, mais ils savent qu’ils sont à la source. Ils se sont donnés les moyens de trouver. Ce sont des chercheurs, pas seulement des aventuriers…

Ma vie de prêtre me fait souvent rencontrer des personnes qui se sont arrêtées en chemin, fascinées, tétanisées par une certaine image de Dieu, une image de Dieu telle, qu’elle ne peut pas donner envie de l’aimer. À cause d’une maladie, d’une haine familiale jamais vraiment dépassée, d’une souffrance trop lourde et non partagée, parfois d’une lecture d’un mauvais livre ou plus simplement d’une mémoire trop lointaine du catéchisme… Si on pense par exemple que Dieu envoie des maladies ou des virus pour punir les hommes de leur impiété, on ne peut pas avoir envie d’adhérer à un message spirituel venant de ce Dieu. Encore moins de lui donner sa vie. Si on réduit le message chrétien à n’être que des consignes morales, comment avoir envie d’avancer dans cette religion ?

Ces mages nous révèlent notre mission, une mission pour chacun de nous, qui que nous soyons : garder, trouver, soigner cette belle image que Dieu a donnée de Lui et non l’image que nous nous faisons de Lui. Garder et regarder ce Dieu que les mages ont vu : le Très-Haut qui se fait Très-Bas pour déposer au milieu de notre humanité sa Présence. S’il nous arrivait aujourd’hui de nous demander comment suivre Dieu, où le trouver, les mages nous indiqueraient le même lieu : c’est dans le pauvre que tu trouveras Dieu. C’est dans le petit que tu trouveras le Très Haut.

Ce pauvre gars solitaire au pied de ton immeuble qui a passé la soirée de Noël au Secours Catholique…
Ce pauvre qui vient de perdre un enfant ou un parent et que tu ne sais plus comment aborder ?
Ce pauvre dont le handicap te renvoie à tes propres richesses et tes propres faiblesses…
Tous ces pauvres que nous connaissons tous.

Dans notre société embrumée dans la peur de perdre et de se perdre, ce sont eux qui nous appellent. Ce sont eux que l’Évangile nous demande de suivre. Depuis Noël, le Christ, c’est Dieu Pauvre (avec un P majuscule !) Vivre avec les pauvres, c’est vivre avec le Christ : c’est peut-être pour cela que les mages sont repartis par un autre chemin. Ils sont comme le jeune homme riche, mais ils ont laissé leurs biens – l’or, l’encens et la myrrhe – et ils sont repartis par un autre chemin avec un autre trésor : un coeur qui a trouvé pourquoi il battait.

Un nouveau siècle commence. Le Jubilé se termine.

Notre Église reçoit aujourd’hui son itinéraire spirituel pour les années à venir.

Références bibliques :

Référence des chants :

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