La tendresse bienveillante

Il y a quelques années, lors d’une messe de premières communions, le célébrant rappelait aux enfants que, puisqu’ils avaient reçu le corps du Christ, ils étaient devenus des tabernacles vivants et que cela devait dorénavant se voir sur leurs visages. Il leur donna ensuite une mission : « la prochaine fois que vous entrez dans une église, observez les gens et lorsque vous voyez quelqu’un qui a l’air triste, allez vers cette personne et demandez-lui ce qui la tracasse. Si elle vous partage ses soucis, promettez-lui de prier pour elle et pour ses proches comme cela elle ne sera plus seule à porter ses tracas. En revanche, si elle vous dit que tout va bien, vous avez maintenant le devoir de lui dire : ‘mais alors pourquoi vous tirez une tête comme celle-là alors que vous êtes dans une église ?’ ». 

Cette histoire réelle, m’amène à la question suivante : avons-nous toujours des airs de sauvés lorsque nous quittons nos célébrations dominicales habités de la présence du Christ auquel nous venons de communier ? Célébrer une fête comme celle d’aujourd’hui est là pour nous rappeler que le Saint-Sacrement est une nourriture spirituelle qui nous pousse à sortir pour partir à la rencontre des autres avec une bienveillance toute divine. A l’image de cette bienveillance du Fils de Dieu qui n’a pas hésité à donner sa vie pour nous. A notre tour, rassasiés de notre communion au corps et au sang du Christ, nous sommes conviés à mettre de la bienveillance dans nos vies. La bienveillance nous permet d’entrer dans une relation non pas de fusion qui conduirait à de la confusion mais plutôt une relation d’union. Et l’union que nous sommes à notre tour appelés à vivre entre nous et avec le Père dans le Fils et par l’Esprit se construit sur une bienveillance réciproque puisque celle-ci est une dynamique de vie à partager. 

En effet, « bienveiller » est le propre de celui qui se sent responsable d’autrui. Voilà pourquoi les postures du « bienveilleur » et du « bienveillé » ne sont pas toujours simples. L’expérience de la vie nous accompagne mais il peut également nous arriver d’être désarçonnés. Il nous faut alors prendre le temps du recul pour poser à nouveau un regard de bienveillance en cherchant à donner sens à ce qui au départ pouvait paraître tellement insensé. Et ce regard nous sommes conviés à le tourner vers un présent éternel, c’est-à-dire, pour reprendre les mots de Lytta Basset : « ce qui reste pour toujours en nous quand une fois, une seule fois peut-être, nous avons été visités par la Bienveillance ». La bienveillance se nourrit ainsi de l’espérance qui s’émerveille des avancées de la vie au plus intime de l’être humain. Elle « accompagne un processus irréversible, au rythme des saisons de chacun » (L. Basset). 

Nous assistons ainsi à la mise à la Vie d’une tendresse bienveillante qui prend sa source dans le coeur de celui qui la donne. Elle réchauffe l’être « bienveillé » de la lumière de l’âme pure du « bienveilleur » qui le pousse à mieux se regarder, à se déplacer vers 

davantage de vérité, à entrevoir une nouvelle espérance de vie au coeur de ses propres blessures. La tendresse bienveillante se marque par un timbre de voix qui ne condamne pas mais qui cherche toujours à relever le « « bienveillé ». 

La tendresse bienveillante se laisse découvrir dans un regard empreint d’empathie qui se pose tendrement sur l’être accompagné. La tendresse bienveillante s’exprime dans la douceur d’une caresse qui fait à nouveau exister l’être aimé. La tendresse bienveillante est donc d’ordre vital et divin. C’est pourquoi, nous sommes toutes et tous invités à conjuguer à foison ce verbe « bienveiller ». Car c’est en bienveillant que nous permettons à la tendresse de se vivre et ce quelle que soit notre situation de vie. Que nous soyons debout, assis ou couché, la bienveillance est à portée de main. Que cette célébration nous permette de vivre nos vies en cohérence avec ce que nous croyons et que la bienveillance soit le signe de l’Esprit Saint au coeur de nos existences. Alors peut-être aurons-nous véritablement des airs de sauvés car nous nous savons, entre nous, tantôt « bienveilleurs », tantôt « bienveillés » mais, en Dieu, toujours « bienveillés » afin de devenir « bien éveillés » à la Vie qui nous a été donnée. 

Amen 

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