Tout au long de notre chemin vers la crèche de Bethléem la liturgie place des personnages qui vont nous y conduire : Isaïe, Jean le Baptiste, Marie et Joseph.

Ce dimanche-ci l’Église nous en présente deux : Isaïe le prophète et Jean le Baptiste. Ils sont les gardiens devant la porte et veillent à l’entrée de la grotte de la Nativité. Impossible d’arriver auprès de l’Enfant, sans passer par eux, sans que nous ressemblions quelque peu à eux.

Voici donc Isaïe et Jean Baptiste. Que nous disent-ils en ce dimanche ?

Comme leur message est différent ! Passer de la première lecture d’Isaïe à l’Évangile, on passe d’un monde à un tout autre. Isaïe c’est la douceur et la tendresse même. Vision d’un avenir sans nuages, vision du parfait bonheur. Jean au contraire, la sévérité même. Ces deux sentinelles devant la grotte de la Nativité ne se ressemblent guère. C’est le doux et le dur.

À écouter déjà simplement les mots qu’ils utilisent : quelle différence ! Isaïe parle d’un petit rameau fragile, d’un enfant doué de conseil et de sagesse, d’un juge dont les jugements sont tout en faveur des pauvres du pays. Isaïe décrit une vision de paix et un monde sans violence, où l’agneau habite avec le loup, où le léopard se couche près du chevreau et où l’enfant dort sur le nid du cobra. Où l’amour de Dieu couvre toute la surface de la terre, comme les eaux couvrent le fond de la mer. Vision de tendresse et de bonheur, ciel sans nuages. Une immense paix dans le cœur des hommes et sur toute la surface de la terre. Oui, Isaïe : le doux.

Mais dans l’Évangile ! C’est Jean. Et il est dur. Il porte un vêtement de poils de chameau. Dur ! Une ceinture de cuir. Dure ! Il mange des sauterelles et du miel sauvage. Et quand il ouvre la bouche : « engeance de vipères », dit-il. « Convertissez-vous. La cognée est à la racine de l’arbre. Dieu tient en main la pelle à vanner. Il viendra nettoyer lui-même son aire. » Dur, dur.

Mais alors, qui des deux est le vrai veilleur devant la porte ? À quelle école se mettre pour arriver à la Crèche ? Isaïe ou Jean ?

Sans doute les deux. Puisque Dieu en a mis deux devant l’entrée.

En effet, le christianisme est à la fois doux et exigeant. Il se nourrit à un paradoxe, qui est d’ailleurs le paradoxe de Dieu lui-même. Dieu est infiniment bon. Mais il est aussi infiniment juste. Il est le Consolateur mais aussi le Législateur, il est le Tendre mais aussi le Juge.

La foi chrétienne est à la fois visionnaire et exigeante. Isaïe nous introduit dans la vision. Car « Sans la vision, nous dit le Livre des Proverbes, le peuple tombe dans la torpeur. » C’est cette vision qui nous garde dans l’espérance et Isaïe est le prophète de l’espérance. C’est lui qui nourrit et oxygène le muscle cardiaque de notre âme : l’espérance.

Mais le Royaume de Dieu ne nous est pas donné automatiquement et sans effort de notre part. Il demande la conversion de notre cœur. Le Royaume ne tombe pas sur le gazon de notre âme comme une pluie printanière. Gratuitement. Car il n’est pas extérieur, un manteau jeté par Dieu sur nos épaules ou un diadème sur notre tête. Il est la métamorphose intérieure de notre cœur, la transformation de notre être intérieur tout entier. Et cela implique le libre effort de la conversion. Et c’est Jean le Baptiste qui debout dans le vent du désert nous le crie : « Aplanissez la route. » Et s’il faut aplanir, c’est qu’il y a des obstacles.

Notre conversion et notre pénitence sont le passage obligé pour arriver à la Crèche. Il faut un effort moral de notre part. Comme il est écrit dans ce même Évangile de Matthieu : « Depuis les jours de Jean le Baptiste, le Royaume des cieux est assailli avec violence ; ce sont les violents qui l’arrachent » (Mt 11,12).

De nos jours, il ne manque pas de prophètes du bonheur. Et leur message est souvent teinté d’un vernis religieux. Que de recettes de bonheur ils nous proposent : méditation, relaxation, eurythmie, eutonie, danse, massage, le dépaysement exotique. Mais toutes ces recettes ont une chose en commun : le bonheur est assuré sans effort de notre part. Car nos peines ne sont qu’une maladie. Prenons le médicament et nous serons guéris. Comme si notre malheur n’était qu’un mal de tête.

Voilà pourquoi le Seigneur a placé devant l’entrée de la grotte de Bethléem deux sentinelles : Isaïe et Jean. Le Doux et le Dur. Seuls en passant par eux deux, nous serons à même de pousser la porte de l’étable de Bethléem et y trouver l’Enfant. Un homme averti…

Références bibliques : Is 11, 1-10 ; Ps 71 ; Rm 15, 4-9 ; Mt 3, 1-12

Référence des chants :

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