La rencontre imminente 

Quelle intimité ! Quelle rencontre ! On y est ! Le moment est venu.

Dans cette maison de Nazareth, le créateur rend visite à sa créature. Considérez quelques instants notre privilège. Nous assistons à la rencontre entre l’envoyé divin et la plus haute, la plus digne, la plus belle des créatures : Marie, de Nazareth. Il lui parle dans la douceur d’un dialogue inouï. Et nous sommes là, silencieux, émerveillés, regardant, écoutant la proposition inconcevable rapportée par l’Ange de la part de Dieu.

Quelle douceur dans cette scène que nous aimons tant ! Elle a tellement marqué notre mémoire religieuse. Nous connaissons ce récit presque par cœur. Reviennent à notre imagination les fresques, les mosaïques, les toiles les plus diverses. L’ange à gauche, la Vierge à droite… à moins que ce ne soit l’inverse. Et vous mes sœurs, c’est votre « madeleine de Proust » spirituelle. Ce récit, c’est celui de votre vocation. Vous, « les annonciades », qui portez le nom même de cette rencontre dans la dénomination de votre congrégation, vous avez tant médité sur cette visite de l’Archange.

Peut-on faire autre chose, à quelques heures de célébrer Noël, que de contempler ce doux tableau avec vous. Ce n’est plus l’heure de faire de la morale, de tirer des leçons, de prendre des résolutions. C’est l’heure de nous émerveiller ; c’est l’heure d’ouvrir nos yeux ; c’est l’heure d’ouvrir nos oreilles.

Qu’entendons-nous ? Nous entendons la « Révélation d’un mystère gardé depuis toujours dans le silence, mystère maintenant manifesté » comme l’a écrit saint Paul aux Romains. Nous entendons ce qui sera merveilleusement chanté dans quelques instants : « Et incarnatus est de Maria virgine et homo factus est. Oui, nous avons bien entendu, Dieu a l’intention de faire sa demeure en notre chair. Voilà ce projet insensé qu’il expose à Marie.

Et il a la délicatesse de ne pas lui imposer. Il attend son acquiescement, il est à l’affût, il guette sa réponse imminente, il en a même besoin. Dieu suspendu aux lèvres de Marie ! Et avec lui, chacun de nous. Comment ne pas citer ici, un peu longuement, Saint Bernard, ce chantre indépassable de la Vierge Marie.

« Ta réponse, ô douce Vierge, Adam l’implore tout en larmes, exilé qu’il est du paradis avec sa malheureuse descendance ; il l’implore, Abraham, il l’implore, David, ils la réclament tous instamment, les autres patriarches, tes ancêtres, qui habitent eux aussi au pays de l’ombre de la mort. Cette réponse, le monde entier l’attend, prosterné à tes genoux. Et ce n’est pas sans raison, puisque de ta parole dépendent le soulagement des malheureux, le rachat des captifs, la délivrance des condamnés, le salut enfin de tous les fils d’Adam, de ta race entière.

Ne tarde plus, Vierge Marie. Vite, réponds à l’ange, ou plutôt, par l’ange réponds au Seigneur. Réponds une parole et accueille la Parole ; prononce la tienne et conçois celle de Dieu ; profère une parole passagère et étreins la Parole éternelle.

Pourquoi tarder ? Pourquoi trembler ?

Voici, dit Marie, la servante du Seigneur : que tout se passe pour moi selon ta parole. »

Frères et sœurs, nous sommes à quelques heures de Noël. L’atmosphère est si particulière ce matin. Dans les foyers, les enfants s’impatientent, les fourneaux s’apprêtent, les familles se préparent. Dans les hôpitaux, les prisons, les maisons de retraite, les lieux de vie les plus isolés, l’atmosphère y est aussi toute singulière. Certains se réuniront et d’autres n’auront pas de visite aujourd’hui : ils seront si seuls ce soir, si loin des êtres aimés, si envieux des lieux de fête. Tous, nous attendons, les uns dans la joie, les autres dans la tristesse. Et Marie ? Marie, elle a déjà dit oui. Marie, elle est déjà prête. Elle est prête à rejoindre chacun là où il est. Car ce soir, la vraie rencontre, elle ne peut se faire que dans l’intimité du cœur de chacun.

 

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