Homélie de Monseigneur Jean-Paul JAEGER, évêque du diocèse d’Arras, Boulogne et Saint-Omer

Patience et ménagement

Dieu a bien de la chance ! Il peut compter sur vous et moi. Nous sommes des serviteurs fidèles. Nous travaillons le champ dans lequel le Seigneur envoie et fait grandir ses enfants. Si tel n’était pas le cas, nous ne nous serions pas ici, ce matin, ou devant notre poste de télévision. Nous ne craignons jamais de nous indigner quand les semailles du Fils de l’Homme sont perverties, frelatées. Nous nous enflammons quand notre société préfère ses propres productions au bon grain généreusement semé par le Seigneur.

Mais il nous arrive de dormir ou de nous laisser endormir. L’ennemi veille et trompe notre vigilance. Ce n’est que progressivement que se révèlent les dégâts de semailles mensongères. Elles sont d’autant plus trompeuses qu’elles poussent en même temps que l’épi qui annonce la récolte.

Alors, il faut faire vite et fort, éliminer jusqu’au dernier brin la mauvaise herbe qui étouffe sournoisement le blé qui promet la vie. Oui, nous sommes des serviteurs zélés prêts à arracher et à jeter. Avec nous, l’Evangile, l’Eglise, le pape, les évêques doivent juger et condamner.
Et voilà que le maître nous arrête. Nous voyons les ravages de l’ennemi. Lui regarde la fragilité de la tige, de l’épi. Pour rien au monde, Il ne veut prendre le risque d’endommager les prémices de la vie.

Nous n’avons certainement pas tort de fustiger le mal. Il est insupportable quand il bafoue et dévalorise l’humanité. Que de fois ne reprochons-nous pas à Dieu lui-même de tolérer le mal, de rester silencieux devant lui ? Dieu fermerait-il les yeux sur l’injustice des puissants ? Oublierait-il la mort d’enfants innocents ? Passerait-il l’éponge sur les atteintes à la dignité ? S’habituerait-il à la folie terroriste ?

Ecoutons ! Le livre de la Sagesse évoque bien la force de Dieu, mais elle n’a rien à voir avec la puissance des muscles ou des armes. Elle s’exprime dans le soin que le Seigneur prend de toute chose. Il n’a pas besoin d’écraser et d’exterminer. Il juge avec indulgence et avec beaucoup de ménagement. Que veut-il, en fin de compte, en faisant preuve de tant de patience, tant de tolérance ?

La Parabole du bon grain et de l’ivraie s’éclaire mieux par ces mots du livre de la Sagesse : « A tes fils tu as donné une belle espérance : après la faute, tu accordes la conversion. » Dieu n’intervient pas à la mesure de notre temps. Il ne se lassera jamais d’offrir au fils égaré le moment favorable pour le renouvellement de son cœur et de sa vie. Pour le Père, ce projet d’Amour mérite de laisser longtemps le meilleur se mêler au pire.

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