Ah! ils n’ont pas la frite, ce petit groupe de pêcheurs autour de Pierre.
Pensez donc, harassés par la fatigue, ils ont peiné toute la nuit, dans le froid, le brouillard, les dangers des tempêtes et cela pour rien ! Pas même une sardine dans leur filet. Alors avant de se reposer, on nettoie et on répare les filets pour la nuit prochaine, mais sans trop y croire.

Frères et sœurs, comme nous leur ressemblons à ces pêcheurs. Nous nous sommes tellement engagés dans nos paroisses, on a tellement donné, nous avons prié et pour quel résultat ? Nos églises se vident, la plupart des jeunes n’y mettent plus les pieds, nos petits-enfants ne sont pas baptisés. La plupart des gens se montrent indifférents à l’annonce de l’Évangile.
Alors la tentation nous guette de nous protéger d’un monde qui nous ignore, nous ridiculise voire nous persécute. Et voilà qu’en plein désarroi, Jésus vient et dit : « avance au large et jette le filet ».
Pierre connaît son métier. On ne pêche pas en plein jour !
Ce n’est pas un charpentier, habitant un village d’où l’on ne voit même pas la mer, qui va lui faire la leçon. Et pourtant Pierre se rend à la parole de ce villageois de derrière les collines. Jésus invite Pierre, comme chacun de nous, à ne pas caboter peureusement le long du rivage, mais à naviguer en eau profonde, à oser le large.

En effet, lorsque nous nous recroquevillons sur nous-mêmes, lorsque nous calfeutrons nos fenêtres, de peur d’être contaminés par les idées du monde, nous ne rejoindrons jamais les préoccupations profondes de nos frères humains.
Si nous pouvons trouver une assurance tous risques chez notre banquier, personne ne pourra nous assurer contre les obstacles encourus, si nous faisons le choix de l’Évangile. A moins, bien sûr de nous murer dans nos sécurités, nos habitudes et nos certitudes.
Frères et sœurs, Jésus nous invite à larguer les amarres, à oser le large. Il l’a fait lui-même en quittant l’intimité de Nazareth pour rejoindre Capharnaüm, ville frontière, au carrefour des peuples, des religions et des cultures. Il s’aventure même dans une ville interdite de Samarie.

Oser le large, c’est aussi avoir l’audace de Jésus-Christ. Suivre un Jésus libre, frère universel qui n’est la propriété d’aucune Eglise, un Jésus meurtri, blessé, bouleversé par toutes les formes de souffrance et d’injustice.
Oser le large à l’exemple de Jésus, c’est rejeter la pensée unique, devenir prophète et comme nous y invite notre pape François, rejoindre les périphéries, ne pas nous installer dans le ronron de nos sacristies. C’est partager le quotidien de nos frères, là où ils vivent, chantent, pleurent, espèrent, entreprennent, souffrent et meurent.
Oser le large, c’est comme Jésus l’a fait, fréquenter la foule de pauvres gens : les blessés de la vie, de l’amour, les estropiés du cœur, du corps et de l’esprit. Regardons autour de nous : ils sont légion, les yeux rougis par les larmes, quémandant un sourire, une main tendue, un peu de chaleur humaine.

Frères et sœurs, en ce jour où nous célébrons le dimanche de la Santé, laissons-nous interpeller par la chaleureuse présence, qu’assurent toutes les personnes engagées aux côtés de nos amis âgés, isolés, handicapés, malades.

Au milieu de l’océan de la souffrance et des questions sans réponse, elles osent prendre le large pour rencontrer le Christ dans l’humanité défigurée. Elles instillent, contre vents et marées, un salutaire goutte à goutte d’amour dans le cœur de ceux qui souffrent.

Frère, sœur, ami.
N’oublie pas de larguer tes amarres, va rejoindre l’humanité en pleine mer.
Tu y rencontreras Jésus.
Ose le large.

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