Frères et sœurs, vous qui êtes ici présents et vous qui nous êtes associés par la télévision,

La veuve de l’Évangile a donné de son indigence, et pas de son superflu. Nous accueillons avec gratitude cette parole de Jésus (Marc XII, 41-44), en ce jour où nous célébrons, dans sa paroisse, le centième anniversaire de la mort d’Élisabeth de la Trinité. Pourquoi Jésus a-t-il voulu donner tant de relief à cette scène qui se déroule à Jérusalem, dans le Temple ? Pourquoi a-t-il voulu en faire la matière d’une leçon à ses disciples, au moment de conclure son ministère public et de se diriger vers sa passion ? Tout simplement parce que l’obole de la veuve annonce le don que Jésus va faire de sa propre vie, quelques jours plus tard.

Comment ne pas associer la figure de la veuve à celle d’Élisabeth ? Dieu connaît le fond des cœurs. Il mesure nos gestes à l’authenticité de nos intentions et de notre amour. Le geste de la veuve est sans prétention, mais il dit tout de sa relation à Dieu. Il nous découvre les profondeurs du cœur humain, là où le royaume inauguré par Jésus prend forme. Son obole en soi dérisoire est l’expression d’une offrande d’une toute autre nature, qui part de son cœur et qui est le don de soi. Jésus a dit que cette veuve « a donné plus » que tous les autres. Le règne de Dieu apparaît dans ces signes improbables et cachés.

Il y a un siècle, Élisabeth Catez mourait au Carmel de Dijon à l’âge de 26 ans, emportée par la maladie. Elle y était entrée cinq années plus tôt en habit de noce. Alors que les jeunes de son âge goûtaient triomphalement la vie, fondaient une famille, prenaient leur place dans la société, développaient des projets, Élisabeth, qui aimait la vie – premier prix de piano au Conservatoire – se retirait pour chercher Dieu. Encore enfant, elle développait un profond amour de Jésus. Au milieu des pétulances de sa jeunesse, elle avait laissé grandir en elle le désir d’être au Christ. Elle entre au couvent comme on entre en mariage. Elle veut que tout son être soit musique et louange de gloire. Elle progresse dans la contemplation de la Trinité, qu’elle ose appeler familièrement « ses chers Trois », et s’éteint en disant « je vais à la lumière, à l’amour, à la vie ».

Quoi de commun avec la veuve de l’Evangile ? Le don de soi ! Autour de la veuve, les plus riches donnaient avec enthousiasme de leur superflu (et personne ne le leur reproche). Au Christ, Élisabeth a donné, sa jeunesse, sa personne, sa vie. On ne suit pas le Christ par contrainte, habitude ou curiosité. Pour donner sa vie à quelqu’un, il faut l’aimer. Élisabeth a quitté le monde et sa beauté pour être la petite graine jetée en terre, qui porte des fruits savoureux, aujourd’hui, dans le monde entier.

Pour donner sa vie, frères et sœurs, il n’est pas nécessaire d’entrer au couvent. Vous tous baptisés, qui écoutez cette parole du Seigneur, vous savez que donner de soi n’est pas réservé à quelques âmes d’élite. L’être humain ne s’accomplit que dans le don de soi, jamais dans le repli égoïste. Le don de soi illustré par l’obole de la veuve, Jésus l’a totalement vécu pour nous. « Le Fils de l’homme est venu non pour être servi, mais pour servir et donner sa vie pour la multitude » (Marc X, 45). Le Christ s’est dépouillé de sa condition divine pour assumer notre condition humaine avec toutes ses faiblesses (cf. Philippiens II, 6-11). Saint Paul commente en disant : « Seigneur Jésus, qui de riche qu’il était s’est fait pauvre pour nous enrichir de sa pauvreté » (2 Corinthiens VIII, 9).

En se faisant homme, le Fils de Dieu nous a révélé l’autre versant de notre humanité, au revers de celui de notre faiblesse, c’est l’appel à entrer avec lui dans la gloire. Qui ne sait pas donner sa vie par amour dans le mariage, le ministère apostolique, la vie consacrée, les engagements au service des autres n’a pas trouvé la clé de l’énigme humaine. Aimer les autres pour eux-mêmes, avec persévérance et malgré toutes les déconvenues, donne sens à notre vie et nous fait déjà entrer dans la vie définitive. Ce n’est humainement possible que par le ressourcement quotidien à l’amour du Christ. C’est dans notre fragilité que s’épanouit la grâce. Nous savons bien que tout ce que nous donnons de notre superflu – matériel, intellectuel, émotionnel, relationnel – ne nous affecte pas. Lorsqu’il y va de ta substance, de ton être, de ta personne, tu sais que tu t’engages dans une relation dont tu sortiras transformé, et plus heureux. Suivre Jésus, c’est nous mettre au service les uns des autres.

Amen.

Pour tout ce qui concerne la liturgie et les chants,
veuillez vous adresser à
Père Marcel Bourland
41 rue Saumaise
21000 DIJON

Mot d’accueil du Père Didier-Marie Golay, ocd

Avec joie, l’Ordre du Carmel s’associe à la célébration de la paroisse Saint-Michel de Dijon – où Élisabeth est venue souvent prier. Élisabeth nous dit : « Il y a un être qui est l’amour qui veut que nous vivions en société avec Lui. Il est là qui nous tient compagnie. Faites comme moi, vous verrez que cela transforme tout ».

Au moment de l’offertoire, avec les mots d’Élisabeth de la Trinité, nous prions :

« Il est en moi. Je suis en lui. Je n’ai qu’à l’aimer, à me laisser aimer et cela tout le temps, à travers toutes choses. S’éveiller dans l’amour, se mouvoir dans l’amour, s’endormir dans l’amour, l’âme en son âme, le cœur en son cœur, les yeux dans ses yeux, afin que par son contact, Il me purifie, et Il me délivre de ma misère. »

Après le chant de communion

Élisabeth nous dit encore :

« Il me semble qu’au ciel, ma mission sera d’attirer les âmes, en les aidant à sortir d’elles pour adhérer à Dieu par un mouvement tout simple et tout amoureux, et de les garder en ce grand silence du dedans qui permet à Dieu de s’imprimer en elles, de les transformer en Lui-même. »

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Références bibliques : 1R 17, 10-16 ; Ps 145 ; He 9, 24-28 ; Mc 12, 38-44

Référence des chants :

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