Frères et sœurs, nous venons d’écouter dans cette église Notre-Dame, la parole du prophète Zacharie : « Pousse des cris de joie, fille de Jérusalem ! Voici ton roi qui vient vers toi… Il brisera l’arc de guerre et il proclamera la paix aux nations. » Ces mots résonnent en ces jours où notre pays commémore le 70e anniversaire du débarquement sur nos côtes normandes.

Dans la nuit du 6 au 7 juin 1944, le largage des bombes américaines commençait sur Saint-Lô. Huit semaines plus tard, la ville et sa belle église Notre-Dame gisaient à terre, presque totalement anéanties. La cité devenait alors le symbole tragique de l’affrontement par le mal contre le mal.

Ce matin, nous portons dans notre prière toutes les victimes, civiles et militaires, de cette violence imprévisible que les forces alliées avaient jugée tragiquement nécessaire pour détruire la violence plus terrible encore du National-Socialisme, ce rêve de gloire et de puissance devenu le cauchemar de l’humanité.

Le 26 juillet 1944, jour de la libération de Saint-Lô, au milieu des ruines et de la désolation, les paroles du prophète Zacharie jaillissaient du fond des cœurs, hymne à la joie devant la fin tant espéré du supplice, espérance que la paix s’imposerait enfin sur notre continent.

Ce matin, en souvenir de cette page décisive de notre histoire, nous sommes rassemblés dans l’église restaurée de Saint-Lô. Ses pierres sont un cri pour que nous nous engagions, les uns et les autres, dans la construction de l’œuvre de la paix. Car la paix, nous le savons, est fragile. Elle exige que chacun en prenne soin.

Le chemin de la paix tant désirée et dont la nécessité se rappelle à nous quand nous regardons les désastres de la guerre, a besoin de toutes nos intelligences afin que l’humanité sache raisonnablement discerner ce qui est bon pour elle, et reconnaître ce qui risque de la conduire à la tristesse et à la mort. Le chemin de la paix a besoin de la sensibilité de nos cœurs pour que nous nous y engagions avec joie et générosité. Mais, plus encore, le chemin de la paix a besoin de la force de l’Esprit de Dieu en nous, parce que la paix est un combat qui demande beaucoup d’énergie.

Dans sa lettre aux Romains, saint Paul oppose l’homme de l’Esprit à l’homme de la chair. « Si vous vivez sous l’emprise de la chair, vous devez mourir ; mais si, par l’Esprit, vous tuez les désordres de l’homme pécheur, vous vivrez. » L’homme de la chair se laisse emporter par les pulsions de l’égoïsme qui réduisent sa vie, car il ne laisse pas d’espace en lui au don de l’Esprit. Au contraire, l’homme de l’Esprit de Dieu ne cesse pas d’élargir son cœur et son intelligence, en les ressourçant dans l’amour et en les engageant toujours plus loin dans le témoignage de la charité. C’est ainsi que la vie s’accomplit en l’homme à l’image de Jésus.

Construire la paix est l’œuvre des hommes de l’Esprit et non pas des hommes de la chair, car la paix est un don spirituel. Elle est le fruit du travail de l’Esprit en l’homme qui donne à la justice, au respect de l’autre, à l’ouverture d’esprit et à la réconciliation, de devenir plus forts en lui que l’iniquité, l’intolérance et la haine, dans la foi que la fraternité a l’avenir pour elle.

Devenir des hommes et des femmes de paix selon la volonté de Dieu, c’est nous laisser porter par le souffle de l’Esprit et regarder Jésus dans l’Évangile, lui, le véritable homme de l’Esprit. Ce travail de la paix n’est pas réservé aux sages et aux savants, ni aux puissants et aux forts.

Dans l’évangile de ce dimanche, nous accueillons la prière de Jésus à son Père. Cette prière est un chant d’émerveillement et d’action de grâce parce que les tout-petits sont les premiers à accueillir le message du Christ. Ces hommes et ces femmes subissaient le poids du fardeau de la condamnation parce que, à cause de leur péché, de leur passé ou de leur impureté, ils étaient jugés incapables de répondre aux exigences de la loi de Dieu. Or, c’est d’abord vers eux que Jésus vient, et son Évangile est pour eux un grand vent de miséricorde, de justice et d’amour dans la puissance de l’Esprit. Tous ces pauvres et ces petits deviennent les signes de la paix de Jésus qui rassemble tous les hommes, dans la réconciliation de l’amour de Dieu vainqueur.

Frères et sœurs, ce don de l’Esprit de justice et de paix, nous le recevons dans notre eucharistie. Résistons par lui à l’emprise de la chair et ses violences. Devenons par lui des hommes et des femmes de l’Esprit, bâtisseurs de paix en notre monde. Ce témoignage rendu au Christ est parfois un fardeau, parce qu’il nous faut affronter courageusement les tentations de la haine, de la vengeance et de la division. Mais il est aussi léger quand nous nous laissons habiter de la présence du Ressuscité qui porte sur lui le péché du monde et en est déjà le grand vainqueur. Qu’il nous bénisse dans sa paix. Amen.

Références bibliques : Za 9, 9-10 ; Ps. 144 ; Rm 8, 9.11-13 ; Mt 11, 25-30

Référence des chants : Liste des chants de la messe à St Lô du 6 juillet 2014

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