La pauvreté des signes, voilà bien leur force ! Il y en a eu des signes, même si on ne s’en tient qu’à l’Évangile de Jean, depuis le premier d’entre eux, depuis ce jour des noces : « Tel fut, à Cana, en Galilée, le commencement des signes de Jésus ». Ensuite, toujours pour ne faire référence qu’à l’Évangile de Jean, il y a eu deux « rencontres-signes » : celle avec Nicodème, puis celle avec la Samaritaine. Et il y a eu le second signe de Cana avec la guérison du fils de l’officier royal. Et il y a eu la guérison du paralytique. Et puis, après le signe de la multiplication des pains, il y a eu la marche sur les eaux… Que de signes ! Et pourtant, la foule continue à réclamer des signes pour voir et croire : « Quel signe vas-tu faire pour que nous puissions le voir et te croire ? »

Ils veulent voir et croire ! Ils n’ont donc pas vu. Patiemment, une fois encore, Jésus cherche à guérir la foule de son aveuglement. Il cherche à l’ouvrir à la symphonie de l’amour de Dieu. C’est le discours sur le pain de vie. Au temps de Jésus, comme dans notre temps, il y a un tel aveuglement possible devant ces signes donnés, une telle surdité possible devant la musique divine.

La pauvreté des signes, voilà bien leur force ! Jamais les signes ne s’imposent comme des preuves irréfutables. Avec des preuves, il n’y aurait plus aucun espace de liberté pour choisir de croire. Seuls des signes, qui se proposent, peuvent ouvrir un espace à la relation, à la foi. Les signes, c’est un peu comme des notes de musique, il faut les repérer, les mettre sur une portée, laisser chaque instrument jouer sa partition et c’est alors, et alors seulement, qu’ils peuvent laisser apparaître une étonnante harmonie et trouver place dans un festival !

La pauvreté des signes, voilà bien leur force ! S’il fallait attendre d’être sûr pour se risquer dans une amitié, une tendresse, une fidélité, une solidarité… il n’y aurait vite plus d’amitié possible, ni de tendresse, ni de fidélité, ni de solidarité ! Si l’on attend des preuves, on risque fort de ne faire confiance à personne car on ne peut jamais avoir une certitude sur les sentiments les plus profonds qui habitent le cœur de l’autre.
 
S’il fallait attendre d’être sûr pour se risquer à la suite de Jésus, pour lui emboîter le pas dans le service de nos frères, pour le laisser nous conduire au Père, il n’y aurait plus, depuis bien longtemps déjà, aucun chrétien ! La fragilité des signes de Dieu, depuis Cana jusqu’aux apparitions, après la résurrection, et jusqu’à aujourd’hui dans nos vies à chacun, voilà ce qui fait leur force. Ils nous révèlent Dieu, qui jamais ne s’impose, qui n’a de cesse de se proposer.

La foi, parce qu’elle est de l’ordre de la relation, la foi ne peut être que la rencontre de deux libertés : celle de Dieu qui fait signe, celle de l’homme qui accueille cette gratuité, cette grâce.

Attention, il ne s’agit pas de jouer aux naïfs mais il nous revient de faire notre métier d’homme en cherchant à reconnaître les signes pour risquer un « croire » avec le plus de lucidité possible, c’est-à-dire le plus de lumière possible. Y compris et peut être même plus encore quand, comme Élie, nous sommes las de vivre, de croire et d’aimer. Et c’est bien en prenant en compte tous les signes qui nous sont donnés, et c’est bien en accueillant toutes les sources de lumière mises à notre disposition que nous apprenons à mettre en musique, dans nos vies, les verbes vivre, croire et aimer.

La pauvreté des signes, voilà bien leur force ! Qu’on ne s’y trompe pas, aujourd’hui comme hier, c’est en réclamant des preuves irréfutables avant de s’engager qu’on finit par ne plus s’engager nulle part ni dans une amitié, ni dans un mariage, ni dans une profession religieuse, ni dans une solidarité, ni dans la foi.

On interdit aux signes de porter du fruit quand on cherche à les transformer en preuves ! La recherche de preuves, en faisant l’impasse sur la liberté, asphyxie l’amour. L’accueil des signes, en appelant la liberté, lui ouvre un avenir.
Avec toutes les ressources d’intelligence, de sensibilité, de confiance qui ont été données aux hommes, Jésus invite chacun dans la foule, dont nous sommes, à accueillir les pains offerts dans nos déserts, les signes donnés dans notre histoire, non pour nous arrêter à eux, mais pour aller jusqu’à la source, c’est-à-dire jusqu’à lui, jusqu’à Lui qui nous dit : « Moi, je suis le pain de la vie »

La pauvreté du signe du pain, voilà bien sa force !

130730 – Il était une foi chez les enfants !

Références bibliques : 1 R 19, 4-8; Ps. 33; Ep 4, 30-5, 2; Jn 6, 41-51

Référence des chants :

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