Les lectures de ce premier dimanche d’Avent veulent nous insuffler un état d’esprit : celui qui anime le veilleur, la sentinelle. On parle beaucoup aujourd’hui des « lanceurs d’alerte » appelés aussi parfois « sentinelles de veille ». Un événement grave menace le bien commun ou porte atteinte à la dignité des personnes – et alors que beaucoup semblent inconscients de ce qui arrive, ou, pire, ferment les yeux – le « lanceur d’alerte » lui, non seulement a vu ce qui se tramait mais il secoue l’opinion et réveille les consciences.

« Frères (et sœurs) » nous dit Saint Paul, « c’est le moment, l’heure est venue de sortir de votre sommeil ». Et Jésus de lancer : « veillez donc », « tenez-vous prêts » !

Si le « lanceur d’alerte » est aux aguets c’est, avant tout, afin de détecter les dangers, les scandales, les catastrophes : les « déluges », comme au jour de Noé, dit Jésus. « On buvait, on mangeait, on prenait femme et on prenait mari » et… « les gens ne se sont doutés de rien » ! En effet, pris dans la routine du quotidien, nos esprits, souvent, s’engourdissent, s’assoupissent. La survie de l’humanité est en jeu et : « on ne se doute rien » ! Jésus nous compare aussi au maître d’une maison – nous pourrions penser à « notre maison commune » pour reprendre l’expression du Pape François. Et ce maître, par manque de vigilance, laisse entrer les voleurs, les malhonnêtes comme dit Paul, qui agissent – précisément – dans l’ombre et profitent de notre sommeil pour saccager et piller notre belle maison.

Le disciple, l’ami de Jésus, lui aussi, demeure éveillé et vigilant pour débusquer et dénoncer toutes les injustices – et Paul appelle vigoureusement à « rejeter les œuvres des ténèbres ». Mais si le disciple de Jésus reste en alerte c’est, d’abord, parce que son attention est toute entière mobilisée pour discerner, déceler au cœur des événements du monde une lumière, une présence, celle du Christ, le Fils de l’homme qui vient. La finale de l’évangile dit littéralement : soyez prêts et veillez « parce qu’à l’heure où vous n’y penserez pas, le fils de l’homme vient ».   En effet, en Jésus, Dieu s’est fait fils de l’homme. Il est devenu notre frère. C’est l’éblouissante révélation de Noël.

Sœur Emmanuelle, la chiffonnière du Caire, aimait répéter cette phrase : “Fends le cœur de l’homme, tu y trouveras un soleil !” Pour chercher et trouver le soleil, attendre son lever, de pied ferme ; l’attendre au cœur de ceux et celles qui nous entourent, dans nos lieux de vie ou de travail, au cœur des situations les plus sombres et des impasses les plus grandes comme nous en connaissons tant aujourd’hui, il faut beaucoup de perspicacité et de sens de l’espérance ; davantage encore que pour dénoncer ce qui est ténébreux, laid ou cruel. C’est à cela que nous sommes appelés. C’est cela qui sauvera le monde.

C’est pourquoi Paul nous dit : « revêtez-vous des armes de la lumière » et il précise « revêtez-vous du Seigneur Jésus Christ ». Etre des chercheurs et des promoteurs de lumière dans toutes les réalités de la vie suppose que nous soyons nous-mêmes, d’abord, revêtus de la lumière qu’est le Christ et de ses armes de justice et de paix. Alors nous participerons, à notre place, au rêve de Dieu – rêve de paix –  si bien exprimé par le prophète Isaïe : qu’un jour les épées et les lances soient converties en socs de charrues et en faucilles, que toutes les armes de guerre produites pour détruire l’humanité soient transformés en instruments destinés à nourrir et à faire grandir la terre et ceux qui l’habitent.

Pour vivre cette période de l’Avent, je vous propose deux pistes. La première : lorsque nous nous habillerons le matin, de le faire consciemment et de nous revêtir en même temps du Seigneur Jésus-Christ : de passer la montre de sa patience, le pull de sa douceur, la robe de sa joie, les chaussures de son espérance. Alors nous serons prêts à lancer l’alerte dès que nous verrons, quelque part, en toute situation probable ou improbable, poindre une aube quelle que soit la profondeur de la nuit. La deuxième : prendre alors soin, le soir, seul ou en famille, de noter une chose, une étincelle de cette divine lumière perçue dans la journée. Le jour de Noël, dans quatre semaines, toutes ces étincelles formeront un beau feu.

Bon Avent. AMEN

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