Au cœur de la semaine de prière pour l’unité des chrétiens, dans laquelle nous sommes depuis mardi, retentit le cri de saint Paul dans la deuxième lecture : « Le Christ est-il divisé ? ». Et il exhorte : soyez « tous vraiment d’accord », « qu’il n’y ait pas de division entre vous, soyez en parfaite harmonie de pensées et de sentiments. »
L’intuition de cette semaine de prière est que catholiques, orthodoxes et protestants implorent Dieu afin qu’il donne à l’Église de recouvrer l’unité mise à mal par les déchirures des siècles passés. Il s’agit d’avancer ensemble vers une unité visible, dont nous savons qu’elle est la volonté de Dieu. C’est pour cela que le Christ a prié juste avant sa Passion, en une sorte de testament spirituel : « Que tous soient un » (Jn 17,21).
Cependant, la bonne entente qui règne actuellement entre chrétiens de différentes confessions ne suffit-elle pas ? Pourquoi chercher davantage, alors que des problèmes beaucoup plus graves se présentent ? Pourquoi investir du temps et de l’énergie à des questions internes au christianisme, alors que le monde souffre et appelle à l’aide ? En fait, l’enjeu est justement là : nous ne pouvons prétendre œuvrer pour la paix dans le monde lorsque nous ne sommes pas en paix à l’intérieur de la famille des chrétiens.
Nous ne pouvons contribuer à l’unité et à la réconciliation dans la société lorsque nous-mêmes sommes divisés. Comment prêcher l’amour et le Dieu-Amour si nous ne pouvons en témoigner entre nous ? « C’est à l’amour que vous aurez les uns envers les autres que l’on vous reconnaîtra pour mes disciples. » (Jn 13,35) Comment être pris au sérieux comme témoins du Christ, si nous offrons un témoignage contradictoire ? Plus encore, dans un monde parfois indifférent au christianisme et à l’Église, nos forces s’épuiseront si nous ne les mettons pas en commun. L’unité des chrétiens n’est pas optionnelle, elle n’est pas un vœu pieux, elle est vitale – pour l’Église et pour le monde.
Alors comment faire ?
En premier lieu, l’unité commence, dans nos communautés elles-mêmes. Quel fléau que les divisions dans nos paroisses : entre ceux qui prient d’une manière et ceux qui prient d’une autre, ceux qui ont l’impression que tout se perd et ceux qui trouvent que rien ne bouge, ceux qui veulent d’abord prier et ceux qui veulent d’abord agir. C’est un véritable poison ! Nous portons en nous une force de jugement et de division qui blesse l’unité de l’Église.
Deuxièmement, nous avons à faire des pas de conversion. C’est bien ce que l’Évangile proclame : « Convertissez-vous ». De fait, la force de division en nous est de l’ordre du péché. Se convertir signifie être libéré du péché, se laisser transformer par la grâce de Dieu.
D’abord transformer notre regard sur les autres chrétiens et sur ceux qui vivent le catholicisme autrement, en reconnaissant en eux une authentique foi au Christ.
Mais également ouvrir les yeux sur toutes les richesses de l’autre : le grand amour de la Bible de nombreux protestants, la ferveur liturgique de la tradition orthodoxe.
Se convertir c’est aussi demander pardon, pour les violences du passé, pour les indifférences ou méconnaissances du présent.
Demander pardon c’est arrêter de chercher qui a commencé et qui a tort. On demande pardon – et on pardonne – parce qu’on veut se libérer de ses jugements et de ses aigreurs, parce que l’on choisit l’amour et l’unité, envers et contre tout.
Alors, oui, dans l’Église, dans nos paroisses et communautés chrétiennes, et dans le monde pourra se lever la lumière qu’évoque l’Évangile : « Le peuple qui habitait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière. Sur ceux qui habitaient le pays de l’ombre et de la mort, une lumière s’est levée ».
Références bibliques : Is 8, 23-9,3 ; Ps. 121 ; 1 Co 1, 10-13.17 ; Mt 4, 12-23
Référence des chants :