Frères et sœurs, l’Évangile que nous venons d’entendre est la conclusion du Sermon sur la Montagne, qui commençait par les Béatitudes. Et la fin du discours de Jésus est exigeante, comme pour nous faire comprendre que l’enjeu de l’Évangile est sérieux, et que c’est notre vie qui est en question. Imaginons le drame de celui qui croyait être un vrai disciple, et qui s’entend dire : « Je ne vous ai jamais connu. Écartez-vous de moi, vous qui faites le mal ». Qu’est-ce que cela veut donc dire, être disciple du Christ, être chrétien ?

Très souvent, nous entendons dire autour de nous : « Moi, je suis croyant, mais non-pratiquant ». Une formule qui rassure, mais qui ne pose pas vraiment d’exigences. Or, Jésus nous dit exactement le contraire : « Il ne suffit pas de me dire : Seigneur, Seigneur ! pour entrer dans le Royaume des cieux ; mais il faut faire la volonté de mon Père qui est aux cieux ». Et plus loin : « Celui qui écoute sans mettre en pratique est un insensé ». Jésus nous dit que notre foi doit être active pour être véritable et vivante. Pour être chrétien, c’est-à-dire du Christ, la foi doit se pratiquer au quotidien, et la manière de vivre doit rejoindre ce que l’on dit croire. Et c’est notre vie toute entière qui est concernée par ce que Dieu nous propose. C’est ce que le texte du Deutéronome, la première lecture, a voulu nous dire : « Les commandements que je vous donne, mettez-les dans votre cœur, dans votre âme. Attachez-les à votre poignet comme un signe, fixez-les comme une marque sur votre front ». Le cœur, c’est-à-dire notre volonté, nos choix ; l’âme, c’est-à-dire le sens de notre vie ; notre poignet, c’est-à-dire nos actions ; notre front, c’est-à-dire notre intelligence. Pour celui qui croit, rien ne peut donc rester étranger à l’Évangile et aux commandements : famille, profession, loisirs, engagement social ou politique, etc.

Ce qu’il faut comprendre, c’est que Dieu ne nous donne pas ses commandements pour nous ennuyer ou nous montrer qu’il est le chef. Car avant de proclamer ces paroles si fortes, Jésus a prêché le bonheur : « Heureux êtes-vous si… ». Quand Dieu nous crée, c’est en vue d’être heureux. Mais ce bonheur n’est pas n’importe quoi. Nous sommes créés d’une certaine façon. Nous avons un « mode d’emploi », qui correspond au fait que nous sommes des êtres humains. Et cela est vrai pour tous, quels que soient le temps ou la civilisation. Et à partir de là, ce qui est bien, c’est ce qui correspond à ce mode d’emploi, c’est ce qui nous rend plus homme. Et ce qui est mal est ce qui détruit notre humanité. Le bien et le mal ne changent pas suivant nos goûts ou nos humeurs. Ils sont fondés sur ce qu’est l’homme. Et même si nous nous trompons nous-mêmes en appelant bien ce qui est mal, le mal reste le mal parce qu’il nous détruit à plus ou moins long terme.

Dieu, lui, depuis toujours, nous supplie de bien choisir. Il nous supplie de suivre ce qu’il nous dit, parce qu’il sait bien, lui qui est notre Créateur et notre Père ce qui peut nous rendre heureux. Écoutons à nouveau le livre du Deutéronome : « Aujourd’hui, je vous donne le choix entre la bénédiction et la malédiction : bénédiction si vous écoutez les commandements que je vous donne ; malédiction si vous n’écoutez pas les commandements du Seigneur votre Dieu ». Les commandements de Dieu ne sont pas un carcan : ils sont les balises de notre vie pour qu’elle soit réussie, ils sont un chemin de bonheur. Nous comprenons mieux alors qu’une foi réelle ne peut être que pratiquante. Notre foi est une foi d’amour. Peut-on aimer sans que cet amour passe dans nos actes et change notre vie ? Non, décidément, croyant non-pratiquant est une expression bien paradoxale !

Les textes de ce dimanche, comme tant d’autres pages de la Bible, nous mettent devant le sérieux de notre vie de chaque jour et notre responsabilité. Mettre en pratique la Parole de Dieu que nous entendons n’est pas une option ; c’est une question de vie ou de mort. Frères et sœurs malentendants, vous savez, vous, ce que veut dire être enfermés dans des situations qui rendent la vie plus difficile. Et même si la science fait des progrès pour vous aider, même si l’amitié qui vous entoure vous aide à dépasser cela, j’imagine bien que votre vie n’est pas forcément simple. Vous n’avez pas choisie votre impossibilité physique à entendre. Mais il y a des surdités morales et spirituelles bien plus graves que celles physiques. Et certaines sont le résultat de nos choix. S’éloigner du Seigneur, ne pas faire passer en actes ce que nous croyons, nous enferment peu à peu dans le silence et la nuit du cœur, nous mettent dans une prison aux murs bien plus épais que toutes les surdités du monde. Au contraire, grâce à la foi, nous pouvons entendre, au plus profond de nous-mêmes, le Seigneur nous dire à quel point il nous aime et nous veut heureux avec lui.

Vous qui avez la chance de m’entendre directement, sans passer par le langage des signes, la présence de nos frères et sœurs malentendants peut être pour nous un exemple. Ils savent combien sont précieux le moindre son, ou la moindre indication leur permettant de comprendre ce que nous voulons leur dire. Dans notre humanité parfois bien sourde aux appels de Dieu, celui-ci nous a donné des signes clairs pour conduire notre vie et comprendre ce que nous pouvons en faire : ce sont les commandements. Ne négligeons pas les signes de Dieu…

Demandons la force de l’Esprit Saint pour que l’évangile d’aujourd’hui ne reste pas lettre morte. Le Christ Jésus nous propose une manière de vivre vraiment digne de l’homme ou de la femme que nous sommes. Puissions-nous, en le recevant dans l’eucharistie de ce dimanche, rendre active notre foi, en nous rendant compte que Dieu ne veut rien d’autre que notre bonheur, mais un vrai bonheur, et non pas sa caricature. Amen.

Références bibliques : Dt 11, 18.26-28.32 ; Ps 30 ; Rm 3, 21-25a.28 ; Mt 7, 21-27

Référence des chants :

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