Frères et soeurs,

Question : qu’apporte à nos vies la résurrection du Christ ? En quoi a-t-elle changé notre rapport à la vie et comment ?

Tout d’abord, notons ce point de grande importance : la scène où se manifeste le Ressuscité est ordinaire, presque banale : elle se passe sur le lieu de l’activité professionnelle de ces pêcheurs qui, après la mort de Jésus de Nazareth ont repris leurs filets, comme avant. Cette scène a la saveur de la vie quotidienne, du labeur que l’on reprend jour après jour, du repas que l’on prépare et que l’on partage pour reprendre des forces. Rien de sensationnel, de « miraculeux » : si la Résurrection signifie quelque chose, ce sera pour dévoiler quelque chose d’inouï dans l’ordinaire de nos vies.

Ensuite, nous comprenons, à l’écoute de ce récit, que le Ressuscité ne se montre jamais comme tel ; je veux dire par là qu’il ne se montre pas nimbé de puissance divine, dans sa gloire, mais dans la condition humaine de Jésus de Nazareth. Autrement dit, et là encore, c’est essentiel : seule une vie humaine peut manifester la Vie du Ressuscité. Nous avons entendu : « Comme c’était déjà le matin, Jésus se tint sur le rivage ; pourtant, les disciples ne savaient pas que c’était Jésus ». C’est curieux : avaient-ils du mal à identifier Jésus comme Jésus ? Ou plutôt peinaient-ils à reconnaître en Jésus le Ressuscité ? Nous croyons, bien à tort, que les disciples ont eu un avantage qui nous est impossible : celui de pouvoir voir le Ressuscité, donc celui d’être dispensé de croire…

Comment en vient-on à reconnaître dans cette figure d’homme, ordinaire, préparant un pique-nique sur le bord du lac, le visage du Ressuscité ?

Un disciple, avant tous les autres, a reconnu en Jésus le Ressuscité, il s’agit de celui que Jésus aimait, celui qui se sait fort de l’amour que lui porte Jésus. Autrement dit, impossible de reconnaître le Ressuscité sans savoir que l’on est aimé. La reconnaissance de l’amour qui nous est donné gratuitement est la condition pour reconnaître le Ressuscité. D’ailleurs, quand l’amour est reconnu, la pêche est abondante. La Vie est généreuse quand on s’étonne d’être aimé.

Cela vaut alors la peine de se jeter à l’eau, ce que fait Simon-Pierre, toujours un peu impulsif mais ne l’est-on pas quand on est attiré par un amour qui est impatient de s’offrir ?
Que peut-on donner à celui qui nous offre son amour gratuit et désintéressé ? Ne répondons-pas trop vite : l’amour car notre réponse ressemblerait à celle de Pierre : « Oui, Seigneur, toi, tu sais que je t’aime ». Les déclarations d’amour sont toujours un peu pressées et pressantes : on a l’impression qu’elles servent avant tout à rassurer. Non, à l’amour offert, la réponse consiste à donner ce que l’on peut : la confiance. D’abord la foi, viendra ensuite l’amour. Or, le plus souvent nous commençons par donner ce que nous croyons avoir : l’amour ; alors que l’amour qui nous est offert n’exige rien de nous, pas même l’amour en retour mais juste ce que nous pouvons donner : un peu de confiance. Dans une relation, nous voulons mettre beaucoup d’amour mais c’est bien souvent pour en épuiser les réserves. Alors que l’amour ne demande rien : il s’offre à la confiance. Il dit : fais-moi confiance, cela suffit pour commencer.

Au fur et à mesure que la confiance grandit, l’amour peut demander : me chéris-tu ? Non seulement la réponse de Pierre est fanfaronne mais, en plus, elle ne répond pas à la demande d’amour par une réponse d’amour. Il dit : « Seigneur, toi, tu sais… » et non : « Seigneur, je t’aime ». Pierre dit aimer mais sait-il ce que signifie aimer ? Il pense que l’amour est une activité, un potentiel que l’on active ou non alors que la vérité de l’amour est dans la passivité. L’amour vrai est accueil d’un amour offert, il n’a rien d’autre à faire.

Alors aimer consiste à y laisser sa vie. A ne pas la garder pour soi. Aimer, c’est se déprendre de soi grâce à l’amour qui est offert par l’autre et qui ne demande rien d’autre que l’abandon de la préoccupation de soi.

Nous nous demandions quel peut être le sens de la Résurrection ? Il nous faut maintenant répondre : La Résurrection est la révélation de ce que nous ignorerions sans elle : la vérité de l’amour. Seul un amour qui y a laissé sa vie peut nous révéler la vérité de l’amour. Sans cette révélation, nous continuerions à penser que l’amour est une capacité que l’on possède et que l’on active quand on veut, si cela nous plaît, si l’autre nous plaît ou nous intéresse. Du coup, en prétendant aimer l’autre, on ne fait que s’aimer soi-même… Et on voudrait que l’autre m’aime de me voir m’aimer moi-même… Triste amour qui n’en a que le nom mais non la réalité.

Mais la Résurrection, me direz-vous ? Elle dit qu’un amour véritable est possible quand il accepte de passer par l’abandon de toute prétention à pouvoir aimer. L’amour vrai donne ce qu’il n’a pas : juste un peu de confiance qui lui vient de l’autre.

C’est la raison pour laquelle le sens de la Résurrection n’apparaît que pour celui qui croit. En dehors de la foi, la Résurrection reste un mystère obscur qui n’engage pas vraiment un rapport nouveau à la vie.

En revanche, celui qui croit se jette à l’eau et ce qu’il reçoit de la vie dépasse ce qu’il pouvait en attendre !

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