Drôle d’idée que de se comparer à une porte ! Quand on entend ce mot, ce sont plutôt des images négatives qui viennent à l’esprit. Portes de nos prisons, massives, verrouillées ; portes de nos maisons aussi, de nos appartements, de nos couvents, de nos églises, portes le plus souvent fermées en cette période et qui – pour notre santé à tous, certes – nous empêchent néanmoins de rejoindre ou de recevoir nos parents, nos proches, nos amis, ne nous permettent pas non plus de nous rassembler en chrétiens pour célébrer le Seigneur comme nous aimerions tant pouvoir le faire ! Portes plus lourdes encore de votre chambre d’hôpital, de maison de retraite, d’EHPAD qui, malgré tout le dévouement des soignants que nous applaudissons chaque soir, ne s’ouvrent que trop rarement et pour trop peu de temps, sans soulager vraiment votre solitude.

Or Jésus ne fait pas que se comparer à une porte, il va jusqu’à dire : « Moi, je suis la Porte » ! Mais écoutons la suite : « Si quelqu’un entre en passant par moi, il sera sauvé ; il pourra entrer ; il pourra sortir et il trouvera un pâturage. » Vous le voyez, avec Jésus, tout change : ce qui semblait le symbole de notre enfermement devient en lui, par lui, la source et le moyen de notre liberté. Avec Jésus, la porte devient vraiment ce qu’elle est : un passage, ou plutôt le passage qui fait que nous pouvons entrer et que nous pouvons sortir. En passant par Jésus, nous entrons dans ce bercail accueillant, dans cette large communion qu’est, que doit être l’Église du Christ pour que jamais nous n’y soyons ou ne nous sentions comme étouffés, parqués, confinés. En passant par la porte Jésus, nous entrons aussi dans l’intimité d’un cœur à cœur avec Dieu, et nous découvrons que nous pouvons le rencontrer en nous-même, porte close, dans le secret de notre chambre intérieure ; nous découvrons qu’il y a en chacun de nous un espace intérieur, très vaste en réalité, et que Dieu agrandit encore, car c’est là qu’il veut faire sa demeure.

« Il pourra entrer, et il pourra sortir », ajoute Jésus, qui n’oppose pas, mais unifie profondément les deux mouvements, vers l’intérieur, vers l’extérieur. Ah, sortir, frères et sœurs ! non pour fuir, nous échapper ou nous perdre dans la recherche folle d’une liberté désorientée, sans but, mais pour trouver un pâturage, un lieu nourrissant, la vie enfin, la vie surabondante que Jésus est venu nous donner et qui s’appelle, dès à présent, la vie éternelle. Cette vie-là, qui est la vie de Dieu, nous ne la possédons pas par nous-mêmes et, de nous-mêmes, jamais nous ne pourrions y accéder. Il faut Quelqu’un pour nous y conduire, quelqu’un qui la possède en lui-même, et c’est pourquoi Jésus n’est pas seulement la porte qui ouvre l’accès à la vie, il est aussi le berger qui nous y entraîne ; c’est lui qui nous fait sortir et même qui nous « pousse dehors », comme dit vigoureusement l’Évangile, car nous sommes souvent comme des brebis apeurées n’osant franchir le pas vers la vie, la vraie liberté des enfants de Dieu. Mais voici maintenant qu’à la seule voix du berger, qui appelle chacun des siens par son nom, nous passons de la servitude, ou d’une semi-liberté, à la liberté pleine et entière, nous passons d’une vie réduite, rognée par l’habitude et le péché, d’une vie morte en quelque sorte, à la vie en abondance, la vie nouvelle, la vie éternelle.

C’est donc bien toujours un passage que nous fait accomplir Jésus, lui qui est à la fois notre porte et notre berger. Or, vous le savez, « passage », c’est ce que signifie le mot « Pâques » en hébreu. Jésus nous fait passer de la mort à la vie parce que, le premier, il a accompli ce passage, cette Pâque, en donnant sa vie pour ses brebis. Et c’est à nous désormais qu’il demande d’être la porte par laquelle, lui le Ressuscité, pourra passer pour partager avec nous sa vie en nourriture : « Voici que je me tiens à la porte, et je frappe, dit le Seigneur dans l’Apocalypse. Si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui ; je prendrai mon repas avec lui, et lui avec moi. »

 

Références bibliques :  Ac 2, 14.36-41 – 1 P 2, 20b-25 – Jn 10, 1-10

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