On critique souvent les journalistes pour leur course au sensationnel, leur précipitation dans le traitement de l’information. On regrette leurs raccourcis.

Mais est-ce bien propre à aujourd’hui, et aux journalistes en particulier ? J’en doute. Il n’y a qu’à voir comment nous, chrétiens, nous maltraitons les paroles de Jésus.

Bien souvent, on ne retient de lui que ce qu’on veut bien entendre.

Prenons par exemple l’évangile d’aujourd’hui. À partir de cette affirmation de Jésus, « Dans la maison de mon Père, beaucoup peuvent trouver leur demeure », certains concluent que toutes les religions se valent.

Mais est-ce bien là ce que Jésus veut dire ?

En revanche, à partir de cette autre affirmation de Jésus, « Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie […] Personne ne va vers le Père sans passer par moi », d’autres au contraire, affirment que seul le christianisme ouvrirait les portes du ciel.

Mais est-ce bien là aussi ce que Jésus veut dire ?

Je m’interroge…

Je me dis que devant les différents films présentés au festival, il ne viendrait à personne l’idée de dire que tous les films se valent, ni à personne à l’inverse l’idée de diaboliser tous les films sauf un ! Alors pourquoi tenir de tels propos dès lors qu’il s’agit de religions ?

Prenons donc plutôt exemple sur Thomas et Philippe dans l’évangile d’aujourd’hui. Ils restent à l’écoute de Jésus au lieu de s’en tenir à leurs idées bien arrêtées.

Prenons exemple aussi sur les moines de l’île de Lérins, que nous avons été quelques-uns à rencontrer, comédiens et cinéastes, mercredi dernier en marge du festival du film, dans le cadre du « festival du silence ».

Tout comme leurs frères les moines de Tibhirine, ces hommes restent des chercheurs de Dieu tout au long de leur vie au monastère. Ils sont convaincus de leur foi. La foi même les invite à respecter celle des autres. Ils se savent encore en chemin. Ils savent qu’ils n’auront jamais fini d’apprendre jusqu’où va l’amour, l’amour tel que Jésus l’a manifesté tout au long de sa vie… Comme le disait un jour un théologien, le père Bernard Sesboüé (*) : « N’oublions jamais que nous pouvons avoir tort dans notre manière même de prétendre avoir raison. »

Cela nous amène, nous, chrétiens, à toujours revenir à ce qu’a dit et fait Jésus. Car de Jésus, on ne peut pas dire qu’il n’a pas assez aimé ou qu’il a mal aimé. Jésus est habité par une seule logique : celle de l’amour. Il ne nous dit qu’une seule chose : Dieu est amour. Il ne fait qu’une seule chose : nous montrer son amour. Il nous lègue un seul commandement : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. »

Les films que nous voyons sont à l’image de ce que nous sommes. Tous, d’une manière ou d’une autre, traversent cet insatiable besoin que nous avons d’aimer et d’être aimés, avec les miracles qu’un tel besoin suscite, les dérives qu’un tel désir entraîne. Histoires d’amours retrouvés, d’amours reconquis, d’amours ratés, d’amours perdus

L’espace d’une heure ou deux, plus encore si le film a touché une corde sensible en nous, nous y voyons la vie qu’on aurait aimé avoir et qu’on n’a pas eue ; celle qu’on aimerait avoir mais qu’on n’ose pas ; celle dont on ne voudrait pour rien au monde mais que l’on sait possible. L’espace d’une heure ou deux, une histoire fictive se mêle à notre histoire propre, vient en interroger le sens… Jusqu’à en changer le cours ?…. Peut-être…

Ce qui est sûr en tout cas, c’est que Jésus, pour qui veut bien se mettre à son écoute, peut bouleverser une vie et la conduire très loin.

Car à ceux qui reconnaissent qu’ils ne savent pas aimer, il dit : je suis la voie. À ceux qui craignent de se tromper en choisissant l’amour, il dit : je suis la vérité. À ceux qui s’inquiètent que l’amour puisse avoir le dernier mot, même sur la mort, il dit : je suis la vie. À ceux qui croient que le paradis ce n’est pas pour eux, il dit : je vais vous préparer une place. À ceux qui doutent que leur foi puisse changer le monde, il dit : celui qui croit en moi accomplira des œuvres plus grandes que moi.

Malheur donc à moi si je n’annonçais pas l’Évangile, moi qui en découvre chaque jour la beauté, la profondeur, la vérité, la force ! Mais attention aussi à moi dans la manière de l’annoncer !

Donne-moi donc, Seigneur, toujours plus de cet amour, de ton amour, de cet amour qui comme toi toujours propose, à temps et à contretemps, et qui en même temps jamais n’impose.

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* Bernard Sesboüé, Hors de l’Église pas de salut. Histoire d’une formule et problèmes d’interprétation, Paris, Éd. Desclée de Brouwer, 2004. 396 p., p. 301.

Références bibliques : Ac 6, 1-7 ; Ps. 32 ; 1 p 2, 4-9 ; Jn 14, 1-12

Référence des chants :

 

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