Chers frères et sœurs dans le Christ,

Aujourd’hui on a du mal à s’imaginer la situation il y a 75 ans. Une guerre cruelle venait de s’achever. Tant de morts. Des atrocités indicibles sans aucun sens ! Une guerre qui a vraiment fait sortir le pire de l’homme ! Comment ne pas perdre la foi en l’homme et en Dieu son créateur ? C’était cela la situation ! Comment relancer une vie pacifique après une telle catastrophe ? Comment pardonner ? Comment avoir confiance en l’autre, en particulier en l’ennemie héréditaire ?

Et pourtant, cela a eu lieu ! Pour moi, c’est cela le miracle de l’après-guerre ! Assez rapidement des liens entre français et allemands se sont créés. Cette réconciliation a culminé dans le Traité de l’Élysée qui scellait cette nouvelle amitié, qui personne ne pouvait imaginer le 8 mai 1945, jour de la capitulation du Troisième Reich.

Personne ne pouvait l’imaginer ! Il y avait pourtant des personnes qui voyaient plus loin, qui n’avaient pas perdu la foi en l’homme et qui étaient convaincus que la réconciliation était possible ! Figures comme l’abbé Stock, qui ont cru que le mal ne pouvait pas prévaloir. Ici, dans ce camp, il avait créé ce « séminaire des barbelés » pour former des prêtres qui devaient proclamer la bonne nouvelle d’un Dieu d’amour et de réconciliation, et qui donne une nouvelle vie. Je suis très reconnaissant aux « Amis de l’Abbé Franz Stock » – en France et en en Allemagne – qui nous aident à garder vivante la mémoire de ce titan de la paix et de réconciliation.

Je me suis demandé ce que motivait ce prêtre, originaire de Neheim, une petite ville en Allemagne ! Était-il naïf ? Quelqu’un qui ne voulaient pas voir la réalité ? Un idéaliste ? On pourrait le croire s’il n’avait pas connu les souffrances des hommes dans la guerre. Mais pendant la période de l’occupation, l’Abbé Stock avait été aumônier des prisons de Paris, et il a dû accompagner plus de mille condamnés à mort dans les derniers moments de leur vie. Il a vu leurs regards de peur devant la mort qui les attendait. Une mort sans aucun sens. Il a dû lui-même douter de la nature humaine !

C’est là où est né le surnom qui lui a été donné : « L’Aumônier de l’enfer » et « L’Archange en enfer ». Donc, il ne pouvait pas se faire des illusions sur la nature humaine. Mais comment alors a-t-il pu croire en un avenir de paix et de réconciliation ? Qu’est-ce qu’il avait dans la tête, ou mieux, dans son cœur ?

Je pense qu’on ne peut pas comprendre cet homme si on ne considère pas la foi chrétienne qui l’animait ! Les lectures de ce dimanche nous offrent des repères concrets : dans la lettre de Saint Paul aux Philippiens nous retrouvons cet idéal de l’unité : « Pour que ma joie soit complète, ayez les mêmes dispositions, le même amour, les mêmes sentiments ; recherchez l’unité. » Même si, ici, Saint Paul s’adresse à une jeune communauté chrétienne locale, on y retrouve quand-même cet idéal très large de l’unité dans le Christ. Le Christ a sauvé tous les hommes, et il conduit tous les peuples et nations vers la Jérusalem céleste. C’est cela l’essence du mot « catholique » _ et je parle comme Allemand d’origine italienne avec le cœur en France – : Dans la foi toute l’humanité est appelée à reconnaitre en l’autre le frère, indépendamment des différences et divergences.

Mais comment la foi chrétienne nous pousse à surmonter les divisions et à ne plus nous enfermer dans nos frontières ? Qu’est-ce qui a motivé l’Abbé Stock à croire qu’il y avait une mystérieuse connexion entres les allemands et les français, plus forte que les mensonges répétés par ceux qui étaient au pouvoir ? Très certainement sa foi en la personne de Jésus, Fils de Dieu fait homme, tel que Paul en témoigne dans sa lettre aux Philippiens

Dieu fait homme, nous est proche jusqu’au bout : c’est pourquoi Jésus s’est abaissé, devenant obéissant jusqu’à la mort. Il a aimé jusqu’au bout ! « C’est pourquoi Dieu l’a exalté » nous rappelle Saint Paul. Si « au nom de Jésus tout genou fléchisse au ciel, sur terre et aux enfers » il n’y peut pas avoir une race supérieure à l’autre ou une vie plus précieuse que l’autre ! Nous sommes UN ! Ceci nous mène à une ouverture inconditionnelle à l’autre et service de l’autre, malgré ses différences et ses offenses. Notre vocation est de faire comme le Christ a fait – avec bienveillance et dans les gestes de chaque jour et jusqu’au pied de nos croix d’aujourd’hui.

Nous, les chrétiens, nous avons une vocation très importante pour aujourd’hui : nous tous nous devons être des « Archanges » qui portent la bonne nouvelle dans notre monde marqué toujours par la violence et la souffrance. Notre message demeure : Réconciliation et paix sont possibles ! Soyons une présence chrétienne compatissante au plus près de l’humanité, au cœur du monde.

Amen.

Références bibliques : Ez 18, 25-28 ; Ps 24 (25), 4-5ab, 6-7, 8-9 ; Ph 2, 1-11 ; Mt 21, 28-32

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