Ces quelques mots : « ceux que tu m’as donnés »,  ont posé bien des questions. — « Je ne prie pas pour le monde, je prie pour ceux que tu m’as donnés. »

Nous sommes ici au cœur de la grande prière de Jésus avant sa Passion. Dans le plus intime de Jésus, dans sa prière. Aucun autre passage de l’Évangile ne plonge aussi profond dans l’intimité du Christ.

Or, dans cette intimité, Jésus prie pour ceux que le Père lui a donnés, c’est-à-dire les disciples. Pas le monde : les disciples.

Ce groupe d’homme, et de femmes, car on peut y mettre, outre les douze, tous ceux dont l’Évangile nous donne les noms, Nicodème, Marie de Magdala, Lazare, Marthe, Cléophas et sa femme, et tous les autres, qui sont les amis de Jésus, ceux qu’il aime, ceux qu’il a croisés au long de sa vie, ceux qui lui ont été donnés

Exactement comme ceux que nous aimons. Car ceux que nous aimons nous ont été donnés, eux aussi : notre famille, qui nous n’avons pas choisie ; notre mari ou notre femme, que nous aimons, souvent, sans savoir pourquoi, même après bien des années ; nos enfants, qui sont donnés, si j’ose dire, « tels quels », avec leur caractère bon ou mauvais, leur corps fort ou fragile, sans que nous choisissions ; nos amis enfin, dont la première rencontre, si nous nous la rappelons, fut toujours due au hasard.
Ou plutôt non… Je viens de prononcer le mot « hasard », mais ce n’est pas un hasard. C’est le don du Père. C’est lui qui nous a fait rencontrer sur les bancs de l’école, ce jour-là, en apparence parce que nos noms se suivaient dans l’ordre alphabétique, en fait parce qu’il avait prévu de nous donner l’un à l’autre. 

C’est lui, le Père, qui nous donne nos amis, notre famille, nos enfants.

Et parce qu’il nous les a donnés, nous en avons la charge. La charge d’en prendre soin, de nourrir, d’habiller, d’écouter, de consoler, d’éduquer, de faire tout le bien qu’on peut faire à un ami, une épouse ou un fils, et enfin de prier pour.

Et vous le savez bien, puisque vous le faites. Nous le savons, puisque nous le faisons tous. Spontanément, d’un mouvement du cœur.

En paroles, nous avons souvent la prière un peu abstraite, pour des causes générales ou lointaines. Mais notre cœur, lui, ne se trompe pas : il prie pour ceux qu’il aime, pour les visages qu’il connaît. Et c’est tant mieux. Parce que c’est de ceux-là, ceux que le Père nous a donnés, que nous avons la charge.

Et le reste du monde, alors ? Eh bien ! Le cœur de Jésus ressuscité est assez grand pour le contenir en entier. Notre cœur à nous n’est pas aussi grand, mais nous pouvons l’élargir. Devenir sensibles non seulement à certaines rencontres, mais à toutes les rencontres. Prier pour des inconnus dont le visage a accroché notre œil, et se laisser accrocher par beaucoup d’inconnus. 

Nous sommes en juin ; l’été vient, la saison des rencontres, des amis d’amis et des copains de copains. Autant d’occasions de nous laisser donner qui aimer, qui aider, pour qui prier.  

Envahis chez nous par nos petits-enfants, bousculés dans le train par nos voisins de compartiment, émerveillés par des visages nouveaux, ou intrigués, ou simplement touchés, nous pourrons alors dire : « Père, je prie pour ceux que tu m’as donnés de longue date. Ceux que tu viens de me donner, là, à l’instant. Tous ceux que tu vas me donner, si toi-même tu veux agrandir mon cœur. Jusqu’au monde entier si tu le veux. » Amen.

Références bibliques : Ac 1, 12-14 ; Ps. 26 ; 1 P 4, 13-16 ; Jn 17, 1-11

Référence des chants :

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