« Venez, les bénis de mon Père, et recevez le Royaume en héritage ! » Frères et sœurs, en cette solennité du Christ, Roi de l’univers, l’Évangile nous laisse entendre que Dieu ne veut pas se réserver le titre de la royauté, mais qu’il désire en partager l’héritage avec tous. Avec tous, et pas simplement avec ceux qui le connaissent : « Seigneur, quand est-ce que nous t’avons vu ? »

Mais qu’est-ce qui peut nous faire entrer en possession d’un tel héritage ? L’Évangile répond assez simplement : ne pas se dérober à celles et ceux qui sont dans le besoin. Et quand Jésus évoque cela, il décrit trois types de besoins essentiels de l’humain : les besoins vitaux de celles et ceux qui ont faim et soif ; les besoins d’hospitalité et de fraternité de ceux qui n’ont plus de lieu où vivre chez eux, et pas non plus de sécurité tant ils sont dépouillés de tout ; les besoins de guérison et de miséricorde. Être héritier du royaume dont parle Jésus dans cet évangile, ce n’est pas hériter d’un titre, d’une propriété ou d’un pouvoir. Être héritier du royaume, c’est continuer d’apporter sa propre contribution à la construction d’une humanité où chacun trouve sa place, parce que chacun se voit offrir la place qui lui revient : celle d’un frère en humanité. Nous entendons ainsi deux messages complémentaires : le royaume que nous pouvons hériter est l’humanité transfigurée par la bonté dont l’homme a été créé capable ; dans ce royaume, aucun petit n’est délaissé et relégué dans les marges de la vie de tous.

Mais un tel royaume est-il possible ? C’est probablement la question que se posait le peuple d’Israël auquel s’adresse le prophète Ézéchiel, au cœur de l’épreuve de l’exil. Le peuple a de quoi être découragé et s’interroger pour savoir s’il n’est pas tout simplement abandonné à un destin tragique qui le fera disparaître. Et le prophète prend la parole. Vous êtes vraiment le peuple de Dieu ! Et si, à vues humaines, vous pouvez penser que la disparition et la mort sont votre sort, parce que personne ne prend soin de vous, entendez cette nouvelle : c’est Dieu votre gardien, c’est lui votre berger, parce qu’il est votre Roi. Nous voilà à nouveau devant une image inhabituelle du Royaume. C’est l’image d’un troupeau protégé par son berger. C’est l’image d’un berger qui se dépense sans compter pour rassembler les brebis perdues dans la tempête du désespoir et du découragement, d’un gardien qui prend un soin tout particulier des brebis les plus faibles et de celles qui sont blessées par la vie, d’un berger qui éclaire le chemin quand les ténèbres semblent l’emporter, qui n’hésite pas à prendre le risque de sa propre vie pour aller libérer celles qui se trouvent prises au piège de toutes sortes d’aliénation. Le Royaume qui nous est promis en héritage est un royaume de communion dont la seule autorité est celle de la compassion du berger qui ne veut perdre aucune des brebis que le Père lui a confiées.

Mais comment un tel Royaume est-il possible ? Ou plutôt quel est le secret d’un tel Royaume ? L’apôtre Paul nous indique la réponse. Dieu, le berger, est venu pour chercher, libérer et rassembler. Dieu, lui-même, en son Fils, a pris le risque de partager l’épreuve de son peuple et d’affronter avec lui ce qui le divisait, ce qui le dispersait, ce qui le détruisait. En affrontant ces puissances du mal, le Fils de l’Homme a renversé leur pouvoir et a détruit la mort. Désormais, c’est la puissance de sa propre vie, ressuscitée, qui habite mystérieusement l’humanité et la transforme en son Royaume. « Si je traverse les ravins de la mort, je ne crains aucun mal », chantait le psalmiste. À nous, aujourd’hui et demain, à nous qui sommes capables de répondre aux besoins de nos frères en humanité mais qui sommes aussi, parfois, capables de nous y dérober, il revient de choisir : « Tu es avec moi, ton bâton me guide et me rassure. » Dans l’épreuve de la torture et de la mort injuste, les martyrs du Congo ont fait ce choix : la mort n’est pas le dernier mot de la vie, la violence ne donne aucune autorité pour gouverner le monde. Le Roi a établi son trône au milieu de son peuple. Et du haut de cette Croix, jaillit la vie, donnée une fois pour toutes pour que le monde ait la force et le courage de devenir le vrai royaume. « J’habiterai la maison du Seigneur pour la durée de mes jours. »

Références bibliques : Ez 34 :11-17 ; Ps. 22 ; 1 Co15, 20-28 ; Mt 25, 31-46

Référence des chants :

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