> Première homélie par le père Michel Evdokimov (orthodoxe) sur le texte de l’Exode.

"Là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux."

Par ces paroles, nous avons l’impression que le Christ va définir ce qu’est l’Église. L’Église est avant tout un rassemblement de femmes, d’enfants, d’hommes de chair et de sang qui se rassemblent autour du Seigneur pour partager l’amour que le Seigneur leur donne. Et aujourd’hui nous sommes rassemblés en Église. Mais lorsqu’on est rassemblé, il faut un lieu. Aujourd’hui nous sommes dans une église magnifique.

À l’époque de Moïse, ce n’était pas le cas. L’Église de l’Ancienne Alliance n’avait pas de lieu. Et voilà qu’à la fin du livre de l’Exode, Dieu recommande à Moïse comment bâtir, comment construire, comment organiser ce lieu d’Église qui sera une Église portative puisque le peuple errait à travers le désert du Sinaï. Ce lieu d’Église sera une tente, une tente que l’on appelle la tente de la rencontre, de la rencontre entre l’homme et Dieu.

Dans cette tente il y aura l’Arche d’Alliance, un coffre en bois où se trouvent les choses les plus précieuses que le peuple hébreu voulait garder. Il y avait des chandeliers, aussi, qui brûlaient comme pour rappeler que Dieu est lumière et feu.

Et puis, il y avait une nuée lumineuse. Qu’est-ce que c’est que la nuée lumineuse ? La nuée lumineuse, c’est un nuage de lumière qui enveloppait la tente et qui précédait le peuple dans son errance à travers le désert. Et lorsque la nuée s’arrêtait, le peuple s’arrêtait et il dressait le camp. Lorsque la nuée se levait, le peuple levait le camp et suivait la nuée.

Quelle était la signification de cette nuée ? Peut-être quelque chose de très simple : c’est que c’est Dieu qui conduit son peuple sur des voies qui sont les siennes.

Lorsque nous pensons, lorsque nous lisons l’Ancien Testament, nous devons toujours nous interroger : qu’est-ce qu’il a à nous apprendre, qu’est-ce qu’il nous dévoile ? Moïse voyait la nuée lumineuse. Et Moïse parlait avec Dieu et Dieu lui parlait. Et pourtant on a l’impression qu’il y avait encore un abîme infranchissable entre Moïse et Dieu, un abîme de transcendance en quelque sorte. Eh bien, cet abîme infranchissable, cet abîme de transcendance, a été comblé. Il a été comblé par Dieu lui-même lorsque Dieu est venu sur terre, lorsque le Christ s’est incarné, lorsqu’il a accepté d’assumer notre condition humaine.

Le Christ maintenant est devenu, tout en restant Dieu, un ami, un proche de nous. Et plus que cela, il s’offre en nourriture, au point que nous sommes en quelque sorte, lorsque nous communions au pain et au vin, investis par des énergies divines.

Et puis, il y a cette parole de Saint Paul aux Éphésiens, qui nous dit que nous avons été en Christ élus dès la fondation du monde. Qu’est-ce que cela veut dire ? Un auteur du 9e siècle qui s’appelait le Pasteur d’Hermas a expliqué, a désigné, a décrit l’Église comme une femme âgée, resplendissante de beauté. Pourquoi une femme âgée ? Il répondait : "Parce qu’elle a été créée avant la fondation du monde. Et c’est pour elle que le monde a été créé, que toutes choses ont été créées". Et alors nous comprenons qu’il y a un mystère de l’Église, un mystère de toute éternité, que cette Église existe, existait avant la fondation du monde, et qu’elle durera jusqu’à la fin de ce monde.

Et Moïse, quelques millénaires avant nous, a vécu une de ces étapes du développement de l’Église, tout comme nous vivons une autre étape en ce XXIe siècle, une étape de développement de cette Église par laquelle Dieu nous conduit vers son Royaume.

Amen.

> Deuxième homélie du pasteur Philippe B. Kabongo-Mbaya (Église réformée de France), sur le texte de l’Évangile selon Matthieu.

Bienvenue à vous toutes, à vous tous !

"Là où deux ou trois sont réunis en mon nom, dit le Seigneur, je suis au milieu d’eux."

Que cette parole de confiance et toute la force de promesse qu’elle engage nous soit réellement bénédiction. Car le Seigneur est fidèle. Ce matin, nous sommes tout de même un peu plus que deux ou trois. Et je pense à vous tous, frères et soeurs, qui, au loin, suivez ce service.

Accueillis ici au sein de l’Église copte orthodoxe, nous voulons dire toute notre reconnaissance à cette Église, présence première et symbole vivant du Christianisme deux fois millénaire en terre d’Afrique. Nous avons à coeur cette Église et toutes les autres qui sont victimes de leur situation minoritaire et des passions intolérantes partout sur notre terre. À celles et tous ceux qui vivent leur foi en pleine liberté ou en situations difficiles de contraintes et d’exclusion, la promesse du Seigneur reste une vérité actuelle, elle redit la fidélité du Christ à son Église et sa présence bienfaisante au milieu du monde.

"Là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux…"

Cette déclaration, comme la confiance qu’elle exprime, se comprend aussi comme une exigence, une interpellation concernant la fraternité des chrétiens et l’unité de leurs Églises. Oui, parce que Jésus pourrait inverser cette parole et nous interroger : "Là où deux ou trois se séparent à cause de mon nom, croyez-vous vraiment que je sois au milieu de leurs querelles, au centre de leurs méfiances ou hostilités réciproques ?"

La promesse du Seigneur ici n’est pas une consolation lénifiante, une sorte de parole magique dont le rappel suffirait par lui-même à garantir une vérité sur la communion de l’Église, sur l’authenticité et la crédibilité de ce qu’elle vit, célèbre et enseigne. Nous avons encore des progrès à faire pour sortir des logiques d’exclusion au sein de nos communautés et entre nos Églises.

"Là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux…"

En son nom, au nom de Jésus-Christ : cela signifie de sa part, de sa seule et unique autorité; c’est lui la raison d’être de l’Église ainsi rassemblée; il en est le seul et l’unique donneur d’ordre.
"En son nom" résonne ainsi comme une confession de foi. De nom et de dénomination, nous n’en connaissons qu’un qui puisse véritablement nous réunir, qui puisse remembrer l’Église, quoi qu’il arrive ! Proclamer cela, diriez-vous, est facile; le problème, c’est comment ? Mais, je vous renvoie la question : comment, selon vous, Jésus s’y serait-il pris ?

Les Évangiles décrivent comment Jésus attestait la présence de son Père, et notre Père, partout où les intolérances et les injustices généraient des divisions insupportables. Ils nous montrent également comment Jésus a témoigné de la présence secourable de Dieu partout où les êtres humains étaient niés dans leur dignité, livrés à leur sort, abandonnés à la fatalité de la maladie et au désespoir de la mort. Dieu est milieu de cette détresse, comme une protestation maintenue devant tout ce qui asservit l’humain ou le détruit. Son règne est le signe de l’humanité réconciliée avec elle-même, une humanité enfin responsable de l’avenir de la terre comme espace habitable, vivable par tous, et non pas seulement par quelques-uns.

Au fond, la question n’est pas de savoir combien sont réunis ou réunissables; deux ou deux cents, trois ou trois mille. Elle est d’identifier qui est au milieu d’eux, qui est là au centre, eux-mêmes ou un autre qui donne sens à leur vivre-ensemble, le fonde et l’ouvre, au-delà de ce que cachent leurs intérêts, leurs angoisses, ou toutes ces autres raisons difficilement avouables ?

Pourtant, malgré nos égarements, nos infidélités, nos aveuglements, la promesse de cette présence fidèle du Seigneur au milieu de nos vies, au coeur de l’Église, au sein du monde, n’est pas révoquée. Il nous appartient, il vous appartient, de travailler, de prier, de vouloir et de demander, comme nous dit ce texte, afin que nos choix de vie, nos engagements, attestent cette confiance que le Seigneur lui-même, encore et toujours, malgré tout, garde en notre faveur.

Amen.

Références bibliques :

Référence des chants :

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