L’eucharistie et la croix sont des pierres d’achoppement aujourd’hui comme hier. La première annonce de l’eucharistie dans l’Évangile de Jean a divisé les disciples comme la passion les a scandalisés : « Ce langage là est trop fort ! Qui peut l’écouter ? » (Jn 6, 60) et la réponse de Jésus retentit à travers les âges : « Voulez-vous partir, vous aussi ? » (Jn 6, 67)
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Mais nous sommes là, en fête pour le corps et le sang du Christ, avec ces enfants qui feront bientôt leur première communion. En fête de quartier, tous rassemblés par le Christ et tournés vers les autres, vers ceux qui vivent ici sur cette paroisse, vers vous téléspectateurs ; nous sommes accueillis par les saints qui ornent la façade et qui rappellent ainsi l’accueil du Christ pour tous les hommes à travers l’histoire.

En ce premier jour de la semaine, le dimanche, jour de résurrection depuis 2000 ans, la célébration nous réunit pour « annoncer la mort de Jésus jusqu’à ce qu’il vienne » selon la formule de saint Paul (1Co 11, 26). En annonçant sa mort, nous rappelons quel amour nous a pardonnés, quel Dieu nous a aimés. Nous annonçons qu’en Jésus Christ, Dieu a fait gagner la vie sur toute forme de mort, même si cela n’est pas encore totalement réalisé pour tous les hommes.

Nous venons de l’entendre dans la proclamation de l’Évangile, le corps et le sang du Christ sont une nourriture pour la vie. Pas moins de neuf fois nous avons entendu le mot « vie » dans ce court passage de Jean. Nous sommes ici le dimanche, comme dans chaque paroisse, pour la vie, pour la recevoir et la goûter, comme on mange du bon pain. La messe nous apprend la vie comme un don. Mais de quelle nourriture s’agit-il ici ? De quoi sommes nous nourris en cette messe ? On sait que pour être alimenté il faut que le pain soit partagé, qu’il ait le goût de la fraternité et de la solidarité, qu’il ait le goût des autres sans lesquels la vie ne serait plus que cette solitude dont souffrent tant d’êtres humains.

Nous sommes nourris de la Parole proclamée à partir des Écritures et reçue par chacun dans l’assemblée. Elle vient éclairer les uns, toucher les autres, révéler quelque chose au fond des coeurs. Nous n’avons pas entendu la lecture d’un vieux texte ou d’une archive de musée. Nous avons reçu une parole vivante, proclamée à toute l’assemblée, et elle est venue s’insinuer en nous pour faire sa route jusqu’à moment voulu où elle retentira pour éclairer nos choix et fortifier nos décisions. Nous sommes nourris par cette Parole qui devient sur l’autel le corps du Christ. Littéralement ce que nous avons entendu devient bon à manger, telle une nourriture sans laquelle la vie ne serait pas possible. Nous savons que nous vivons grâce aux paroles bonnes qui nous ont été dites depuis notre enfance et que nous mourons aussi des paroles de haine et de mépris qui ont été prononcées sur nous comme meurent des peuples sous les paroles racistes qui les dégradent. La messe nous redit la parole de bonté que Dieu prononce sur nous et elle nous l’offre en nourriture. La Parole entendue prend chair sous le signe du pain pour nourrir en nous la vie que Dieu donne généreusement.

Nous sommes nourris par l’assemblée que nous formons et qui n’est pas un club d’amis qui se sont choisis. En effet, tous sont invités. Nous sommes nourris par notre assemblée, à la manière de celle de Mgr Juan Geradi, assassiné par l’armée en 1998 au Guatemala, qui avait récupéré les témoignages de 6000 survivants de la terreur militaire, ou celle de Mgr Oscar Roméro, en 1980, qui avait célébré la messe pour les martyres des escadrons de la mort au Salavador. Avant d’être assassiné à son tour dans pendant l’eucharistie, il avait rassemblé l’Église, il avait reconstitué le corps du Christ quand la terreur faisait disparaître les corps de ses compatriotes.

Chaque dimanche, en communiant au corps du Christ, se reconstitue ce que la violence et la haine, le mépris et l’injustice ne cessent de faire disparaître. Chaque dimanche, c’est la vie qui triomphe de la mort dès aujourd’hui, dans l’attente de ce jour qui verra disparaître à jamais ce qui défigure l’homme. Aujourd’hui la vie éternelle a commencé.

Références bibliques : Dt 8, 2-3.14b-16a ; Ps 147 ; 1 co 10, 16-17 ; Jn 6, 51-58

Référence des chants :

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