Frères et soeurs,

L’Évangile nous appelle à la vigilance. "Veillez, dit Jésus, car vous ne connaissez ni le jour ni l’heure". Nous sommes dans une société où la vigilance est vue prioritairement comme la prévoyance et la protection face à un danger : on parlera face au terrorisme d’un plan "Vigipirate", face aux épidémies de vigilance et de mesures de précaution et face à la violence et au vol de compagnies de vigiles.

C’est pourtant dans une toute autre direction que nous conduit l’Évangile. Celui-ci nous demande d’être vigilants, c’est-à-dire attentifs, mais à la venue du Seigneur dans le monde et dans nos vies. En effet, l’époux qui vient, c’est le Christ, l’époux de son Église. Il est celui qui est venu, qui reviendra à la fin des temps – et nul n’en sait ni le jour ni l’heure – mais il est aussi celui qui vient aujourd’hui dans notre vie. Dans l’Apocalypse de saint Jean, le Ressuscité nous dit : "Voici que je suis à la porte et je frappe. Chez celui qui entend ma voix et qui m’ouvre, j’entrerai et nous mangerons en tête-à-tête, moi avec lui et lui avec moi".

Avouons que nous ne sommes pas toujours attentifs à cette voix du Seigneur. Nous sommes souvent assoupis, endormis, pris par la vie, affairés à mille choses et nous n’entendons pas le Seigneur venir. La vigilance, au contraire, est une attention, une présence, une qualité du regard, de l’écoute et du coeur. C’est d’ailleurs la même vigilance qui peut s’exercer vis-à-vis de Dieu, vis-à-vis des autres et vis-à-vis de soi-même. Ainsi, ne pas être vigilant, c’est être aveugle sur ce Dieu qui frappe à la porte de notre coeur, c’est passer à côté des autres sans vraiment les voir ni être attentif à ce qu’ils souhaitent nous dire, c’est vivre à la surface de soi et ne jamais se retrouver soi-même.

Alors, quel est le secret de la vigilance ? Le secret de cette attitude qui nous permet d’avoir nos lampes allumées pour accueillir l’époux quand il vient ? Il faut, bien sûr, savoir s’arrêter, souffler, échapper au stress, se recueillir au sens premier du terme, c’est-à-dire se ressaisir intimement, mais il faut surtout habiter sa propre vie, garder sa lampe allumée, alimenter sa flamme, veiller à une certaine qualité d’intériorité spirituelle. Et là, la question rebondit : où se procurer l’huile pour nos lampes ?

Dans son bel Évangile des disciples d’Emmaüs, saint Luc répond à notre question et nous livre le secret d’une vigilance retrouvée. Vous connaissez la scène. Au point de départ, l’esprit des deux disciples est fermé. Leurs yeux sont aveugles. Ils ne reconnaissent pas le Christ dans ce voyageur mystérieux qui marche avec eux. Avec la mort de Jésus, c’est leur espérance aussi qui est morte. L’aventure est terminée. Ils rentrent chez eux. On peut vraiment dire que leurs lampes sont éteintes. Qu’est-ce qui va alors rallumer en eux la flamme ? Eh bien, c’est le contact avec les Écritures parcourues par le voyageur. Oui, c’est la confrontation de leur vie avec la Parole de Dieu qui va faire jaillir en eux l’étincelle. Ils vont d’ailleurs le reconnaître eux-mêmes avec joie : "Notre coeur ne brûlait-il pas en nous tandis qu’il nous parlait en chemin et nous ouvrait les Écritures ?". Nous aussi, n’hésitons pas à ouvrir l’Écriture, la Bible, l’Évangile, à y confronter notre propre vie, à y écouter la parole que le Seigneur nous destine personnellement. C’est une lumière qui éclairera notre vie.

Mais les disciples n’en restent pas là. Le soir, à l’étape, ils voient le voyageur qu’ils ont invité prendre le pain, le bénir, le rompre et le leur donner. Alors, nous dit saint Luc : "Leurs yeux s’ouvrirent et ils le reconnurent". Ils reconnaissent Jésus, entrent dans la compréhension de sa Pâque, de sa mort et de sa résurrection. Pour nous aussi, la fraction du pain, c’est-à-dire la messe, est le lieu où nous rencontrons le Seigneur, où nous communions avec lui et où le Pain de vie devient notre nourriture. Grâce à celle-ci, nous gardons les yeux de notre foi ouverts et nos coeurs éveillés. Oui, chaque messe permet d’alimenter l’huile de notre lampe et de rester attentifs à la venue du Seigneur jusqu’à son retour dans la gloire.

S’il y en a une qui a vécu dans toute son intensité cette attention, cette vigilance au Seigneur, c’est bien la Vierge Marie, la Mère de Jésus, celle qu’on vient tout particulièrement invoquer, ici, à Lourdes. Elle a pu être surprise par ce qui lui arrivait. Elle n’a pas toujours compris sur le moment une parole qui lui était dite ou le sens d’un événement. Et pourtant, elle a toujours répondu oui au Seigneur. Et si elle l’a fait si spontanément, c’est parce que son coeur veillait. Combien de foi n’a-t-elle pas du faire sienne la parole du psalmiste qui chantait : "Mon âme attend le Seigneur plus qu’un veilleur ne guette l’aurore. Plus qu’un veilleur ne guette l’aurore, attends le Seigneur, Israël".

Que la Vierge Marie et sainte Bernadette intercèdent pour nous afin que nous soyons ces serviteurs qui attendent la venue de leur maître et qui gardent fidèlement sa recommandation : "Tenez-vous prêts et veillez !". Amen.

Références bibliques :

Référence des chants :

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