Chers frères et sœurs en Christ,

Avez-vous remarqué qu’il est beaucoup question de « voir » dans cet évangile qui vient d’être proclamé : Zachée cherche « à voir qui était Jésus », il veut « voir Jésus qui devait passer par là » puis c’est Jésus qui « lève les yeux » et voit Zachée ? Enfin, ce sont les foules qui « voyant tout cela » murmurent contre Jésus ? Alors qui voit bien et qui est aveugle ?

Les foules voient la scène et qu’est-ce qu’elles voient ? D’abord, un scandale : Jésus est allé loger chez un pécheur ! Ce scandale a une double dimension : morale et religieuse. Dimension morale tout d’abord. Jésus est allé loger chez le chef des collecteurs d’impôts, des gens de fort mauvaise réputation. Ils lèvent l’impôt pour les Romains mais se servent au passage. D’où leur richesse. Ils pressurent les paysans et sont sans pitié pour les pauvres. Comment un homme de Dieu peut-il aller loger chez un tel individu, sans approuver ce comportement, sans se rendre complice, d’une façon ou d’une autre, avec cette façon d’agir ? « Décidément, il n’y a plus de bien ni de mal. Il n’y a plus de morale. », pensent les foules de Jéricho.
Mais ce scandale a aussi une dimension religieuse : aller loger chez quelqu’un, c’est prendre son repas avec lui, c’est partager le même pain, c’est demander à Dieu de nous bénir. Or, comment peut-on être en communion avec un pécheur, avec quelqu’un qui en prend et qui en laisse dans la Loi de Dieu, qui n’a pas montré de signe préalable de repentance ? Jésus, en offrant sa communion au pécheur qui le reçoit, ne relativise-t-il pas le péché ? Le pardon de Dieu ne vient-il pas récompenser un changement de vie ? Mais, du côté de Zachée, dans son arbre, quel geste de conversion ? Il est venu voir Jésus comme beaucoup de badauds à Jéricho. Oui, pensent les foules, l’initiative de Jésus est choquante. On ne voit pas comment Dieu pourrait approuver cela. Jésus, décidément, n’est pas un homme de Dieu. Ce n’est qu’un provocateur. Les foules restent, en fait à la surface des choses et des êtres ; elle ne voient pas ce qui est en jeu. Elles ne voient pas l’action de Dieu qui est à l’œuvre.

Ce qui me frappe par contre, c’est, tout au long de notre évangile, la transformation du regard de Zachée. Au début, c’est certainement un regard de curiosité. Comme tous les gens curieux de Jéricho, il veut voir à quoi ressemble le prophète de Nazareth. Peut-être a-t-il dans son cœur l’aspiration à un changement, à une autre vie, mais rien ne nous est dit explicitement sur ce point dans notre texte. Par contre quand il voit sur lui le regard de Jésus, quand il entend que Jésus veut venir chez lui, un déclic se fait en lui. Il expérimente ce que peut être une nouvelle vie, le salut qui lui est donné. Alors, la joie l’envahit et il entre dans une autre logique de vie : « Voilà, Seigneur, je fais don aux pauvres de la moitié de mes biens, et si j’ai fait du tort à quelqu’un, je vais lui rendre quatre fois plus. » ( Lc 19, 8).
En Jésus, Zachée découvre le vrai visage de Dieu. Notre Dieu est celui qui nous aime d’une bonté inouïe. C’est lui qui porte son regard sur tous les hommes. Comme dit le livre de la Sagesse : « Tu aimes en effet tout ce qui existe, tu n’as de répulsion envers aucune de tes créatures ; car tu n’aurais pas créé un être en ayant de la haine envers lui. » (Sg 11, 24) Comme dit saint Jean, ce n’est pas nous qui avons aimé Dieu les premiers. C’est lui qui nous a aimés et qui fait toujours les premiers pas vers nous. Son pardon n’est pas une récompense qu’on gagnerait à la force du poignet, un mérite qu’on acquerrait. C’est un don de Dieu que nous recevons gratuitement. En effet, ce n’est pas Zachée qui décide de se convertir puis de demander le pardon de Dieu. C’est le Seigneur qui vient à lui, qui lui offre son pardon et c’est justement ce pardon reçu qui est, en lui, source de force, d’illumination, de transformation, de guérison et de joie. Jésus n’est-il pas justement ce « Fils de l’homme qui est venu chercher et sauver ce qui était perdu. » (Lc 19, 10) ?

La seule chose que Jésus nous demande, c’est de l’accueillir chez nous : « Il me faut aujourd’hui demeurer dans ta maison. » (Lc 19, 5) C’est ce qu’il nous dit explicitement dans le livre de l’Apocalypse de saint Jean : « Voici que je suis à la porte et je frappe. Chez celui qui entend ma voix et qui m’ouvre, j’entrerai et nous mangerons en tête à tête, lui avec moi et moi avec lui. » (Ap 3, 20)
Frères et sœurs, rendons-nous disponibles à Dieu, à son amour, à sa présence, à la force de son pardon. Il nous donnera, à nous aussi, ce cœur nouveau, cet esprit nouveau, cette confiance et cette joie que l’on découvre dans cette conversion de Zachée.

Nos communautés chrétiennes, comme chacun d’entre nous, ont besoin, elles aussi, de se laisser renouveler au plus profond d’elles-mêmes par ce pardon régénérateur de Dieu. Mais, elles ont également, comme toute l’Eglise, à témoigner auprès de tous de cet amour gratuit de Dieu. Elles doivent actualiser pour les hommes et les femmes d’aujourd’hui l’initiative de salut de Jésus, rendre présente sa mission. Or, Jésus n’attend pas qu’on vienne à lui. Il rejoint les hommes dans ce qui fait leur vie, il ouvre des brèches, il traverse des frontières, il affronte des situations nouvelles, il n’a pas peur de risquer sa réputation. C’est ainsi, que les ayant rejoints, il appelle les hommes à la vie, en accueillant cet amour de Dieu qu’il est venu leur offrir.
Prions le Seigneur pour qu’il donne à notre Eglise, à nos communautés chrétiennes et à chacun d’entre nous, l’audace et la joie d’annoncer à tous cet amour de Dieu qui nous fait vivre. Puisse la Vierge Marie, Notre Dame des Missions, Notre Dame de Lourdes, nous soutenir dans notre marche. Amen !
 

Références bibliques : Sg 11, 23-12, 2 ; Ps 144 ; 2 Th 1, 11-2, 2 ; Lc 19, 1-10

Référence des chants :

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