En cette Année de la miséricorde… en cette année où nous célébrons le 17e centenaire de la naissance de saint Martin, que nos frères d’Orient appellent Martin le Miséricordieux, il est heureux que l’Église nous propose cette belle page d’Évangile, une page que nous connaissons bien, mais justement une page à laquelle nous risquons d’être par trop habitués…

« Cet homme fait bon accueil aux pécheurs et mange avec eux. » Cet homme dont nous parle Luc, l’évangéliste de la miséricorde, n’est autre que Jésus lui-même tel qu’il est vu par ses contemporains ! Un homme qui va à la rencontre des exclus, qui guérit les malades, un homme qui, comme le dira Thérèse de Lisieux, n’a pas peur de se mettre à la table des pécheurs… un homme qui, pour reprendre une expression du pape François, n’a pas peur d’aller aux périphéries, un homme qui n’a pas peur de se compromettre avec ceux que l’on évite, ceux que l’on considère trop souvent comme infréquentables.

Un premier élément me frappe : celui de la liberté qui est la nôtre. En effet, si la parabole de ce jour nous parle de deux fils, elle nous parle d’abord d’un père… d’un père qui fait preuve d’une grande liberté par rapport à ses enfants… Il ne cherche pas à retenir son jeune fils qui veut mener sa vie en toute indépendance, il ne discute pas ce que lui demande ce fils. Il lui donne généreusement, en toute gratuité, cette part d’héritage qui n’était nullement un dû… Et ce même père qui laisse partir son fils se tient aux aguets… il espère un retour, il scrute l’horizon… et se met à courir lorsqu’il discerne la silhouette de ce fils tant aimé et tant attendu…

Ce père immobile au début, court à la rencontre son jeune fils, mais sort également à la recherche de son aîné pour l’inviter à prendre part à la fête…

Jésus nous fait comprendre que son Père nous laisse libres, libres de rester avec lui ou de le quitter… il nous laisse libres d’emporter avec nous les richesses de sa création… Mais dès que, de notre part, un retour se dessine, il ne nous comble pas de ses reproches mais de son amour… Dieu nous veut libres…

Le second élément que je voudrais souligner, c’est celui de la gratuité du don de Dieu. Le Père donne gratuitement, non seulement il ne refuse pas à ce fils des biens auxquels il n’avait pas droit, mais il le comble à nouveau et lui rend toute sa dignité… Le retour du fils n’est pas dû à des sentiments particulièrement nobles, c’est la faim et non l’amour qui motive son retour… la bonté prodigue du père est sans commune mesure avec la motivation de son fils… Le père est à l’image de Dieu, de Dieu qui aime, de Dieu qui aime gratuitement, de Dieu qui aime largement… qui n’attend qu’un signe de retour de notre part pour nous combler gratuitement de son amour.

En troisième lieu je voudrais regarder la figure du fils aîné : certes ce fils aîné n’a pas démérité, il est resté auprès de son père et il a continué de travailler à la bonne gestion du reste des biens de son père… Un fils sans histoires, un bon fils en quelque sorte ; mais les choses se gâtent lorsqu’il entend la fête donnée en l’honneur de retour de son frère… de celui qu’il appelle « ton fils que voilà »… des mots qui en disent long… « Ton frère que voilà » répondra le père, rétablissant par-là les liens de fraternité que le fils semble ne pas vouloir reconnaître.

Frères et sœurs, à la lumière de cette page d’Évangile, nous voyons que dans toute vie il y a une expérience fondatrice qu’il nous faut faire : celle du pardon reçu. Il est difficile d’être miséricordieux si nous n’avons pas nous-mêmes fait l’expérience de la miséricorde… rappelons-nous l’affirmation de Jésus : il aimera davantage celui à qui on aura remis davantage… la conversion vraie, le pardon demandé et reçu, nous aident à devenir à notre tour miséricordieux… c’est là une expérience spirituelle fondamentale. Dans notre chemin de conversion, Martin est un témoin sûr, lui dont le geste de partage demeure un signe fort au-delà des temps… un signe fort sur tous les continents. Accueillons la miséricorde dans nos vies, alors nous pourrons à notre tour devenir des signes de la miséricorde… là où nous vivons.

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