Par Julia Itel – Publié le 18/01/2024

Jeanne d'Arc, la « Pucelle », est une jeune paysanne française née en 1412. Guidée par des visions divines, elle joue un rôle décisif pendant la guerre de Cent Ans en contribuant aux victoires françaises. Capturée par les Anglais, elle est condamnée pour hérésie et exécutée en 1431, devenant une figure emblématique voire mythique de l’histoire française.

Quelle est la véritable histoire de Jeanne d’Arc ?

Contexte historique

Lorsque Jeanne naît, le royaume de France, déjà en pleine guerre de Cent Ans, connaît une nouvelle période sombre et tumultueuse. Le roi Charles VI, affaibli par des crises de folie depuis 1392, le rend incapable de gouverner.

Les rivalités éclatent entre les partisans du duc d'Orléans (connus sous le nom d'Armagnacs), frère du roi, et ceux du duc de Bourgogne (appelés les Bourguignons), son oncle. Cette instabilité favorise les ambitions du roi d'Angleterre, Henri V, qui s’empare de la Normandie en 1419 et qui, grâce à l'alliance avec Philippe de Bourgogne par le traité de Troyes (mai 1420), prévoit d'écarter le dauphin Charles du trône. Ce dernier fuit Paris pour Bourges, située en zone libre. La France est alors divisée en trois parties : le Nord, occupé par les Anglais, le Duché de Bourgogne, allé des Anglais, et le Sud de la Loire, terre des Armagnacs.

À la mort d'Henri V en 1422, son héritier Henri VI est proclamé roi de France et roi d’Angleterre. Encore trop jeune pour régner, c'est le duc de Bedford qui est choisi pour assurer la régence en France. En 1428, pour étendre leur pouvoir au Sud, les Anglais assiègent la ville d’Orléans. C'est là que commence l’histoire de Jeanne d’Arc.

Jeanne, la prophétesse

Jeanne naît vers 1412 dans un village de Lorraine, Domrémy. Contrairement au mythe qui s’est construit – déjà de son vivant – autour d’elle, Jeanne d’Arc n’a jamais été bergère : elle vient, au contraire, d’une famille aisée de la paysannerie. Selon les historiens, c'est le chambellan du dauphin, Perceval de Boulainvilliers, qui lui aurait attribué cette image biblique en la surnommant « la petite bergère qui accomplit des miracles ».

Sanctuaire(s) - Sainte-Jeanne-d'Arc de Domrémy

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À l’âge de 13 ans, elle entend pour la première fois des voix. Celles-ci sont accompagnées de lumière. Si elle les craint au départ, elle finit par s’y habituer et les écouter. Selon elle, il s’agit des voix de saint Michel, de sainte Catherine d’Alexandrie et de sainte Marguerite d’Antioche. Elles lui intiment quatre missions : aller en France pour 1) délivrer Orléans, 2) faire sacrer Charles VII à Reims, 3) délivrer Paris et 4) délivrer le poète Charles d’Orléans, retenu prisonnier à Londres. En échange de leur accomplissement, les visions lui assurent protection et succès.

Jeanne commence alors à se tourner davantage vers la prière et la confession. Elle prend également la décision de faire annuler ses fiançailles devant l’official de Toul (ses parents avaient pour projet de la marier) pour faire vœu de virginité. Désormais, elle se fait appeler « la Pucelle ».

À la rencontre du dauphin Charles

Mais comment une jeune fille d’origine modeste a-t-elle pu devenir une figure historique si importante ? En ces temps troublés, marqués par la guerre, la peste, le schisme de la papauté, l’historienne Colette Beaune rapporte dans son ouvrage Jeanne d’Arc : Vérités et légendes (2008) que les prophéties sur l’avenir étaient fort nombreuses. Il était d’ailleurs fréquent que des monarques s’entourent de visionnaires. Avant l’arrivée de Jeanne d’Arc, quelques prophéties circulaient sur une jeune vierge venue libérer le royaume de France, à l’instar de Marie Robine, morte en 1399, ayant vu « une Pucelle qui viendrait après elle pour délivrer la France de ses ennemis », ou encore l’adage attribué à Merlin selon lequel « la France perdue par une femme serait restaurée par une Pucelle ». Le traité de Troyes ayant été promulgué par la reine Isabeau de Bavière, il est possible que ses contemporains aient perçu en Jeanne la sauveuse annoncée.

Après avoir convaincu le capitaine de Baudricourt du caractère divin de la mission qui lui a été confiée, c'est en habits d’homme et dotée d’un cheval et d’une escorte (dont trois de ses frères) que Jeanne la Pucelle part rejoindre le dauphin à Chinon. Le voyage est dangereux : il leur faut traverser des territoires soumis aux Bourguignons. 

Onze jours plus tard, elle rencontre enfin le futur Charles VII. La légende raconte que sans l’avoir jamais vu, Jeanne reconnaît immédiatement le dauphin parmi tous les membres de la cour. Après l’avoir écoutée, le dauphin reprend confiance pour reconquérir son royaume. Mais avant d’entamer toute démarche, la virginité de Jeanne est vérifiée, ses propos sont examinés par des théologiens qui sont impressionnés par l’état de ses connaissances, sa piété observée. On en conclut qu’elle entend bien la voix de Dieu.

Victoires de Jeanne d’Arc

Armée d’une épée et portant un étendard sur lequel figure le Christ des derniers jours, entouré de deux anges et du mot « Jésus-Marie », Jeanne d’Arc part pour Orléans. Selon les historiens, Jeanne n’a jamais été un chef de guerre. Elle a plutôt représenté pour les soldats et le peuple un emblème de courage et de foi sans précédent, jouant de son charisme pour motiver les troupes. Après huit jours de combat, les Anglais sont assiégés et se trouvent contraints de battre en retraite vers la Normandie. Nous sommes le 8 mai 1429, le soleil brille de nouveau sur la France.

Forte de cette première victoire, Jeanne convainc le dauphin de marcher sur Reims pour s’y faire couronner. D’abord hésitant, il obtempère et le 17 juillet 1429, Charles VII est sacré à Reims avec le Saint-Chrême.  

Condamnation et bûcher

Jeanne entend continuer la mission que lui ont confié les voix. Elle veut donc se rendre à Paris pour reprendre la ville aux Anglo-Bourguignons. Mais la Pucelle se heurte à la résistance de la cité. Blessée, elle essuie son premier échec. Le roi dissout son armée. Elle part ensuite pour Compiègne, assiégée par les Bourguignons. Mais elle est rapidement blessée et capturée, puis vendue aux Anglais pour la somme de 10'000 livres.

Emprisonnée à Rouen à partir de décembre 1430, elle est poursuivie pour hérésie et sorcellerie. Reconnue coupable, elle est forcée par l’évêque de Cauchon à signer l’abjuration de ses fautes. Mais deux jours plus tard, elle reprend ses habits d’homme, ce qui la condamne – pour relaps – à mort. Le 30 mai 1431, Jeanne d’Arc meurt sur le bûcher sur la place du Vieux-Marché de Rouen.

Procès en nullité

25 plus tard, le roi Charles VII demande au pape l’annulation de la sentence. La requête est renouvelée par la famille de Jeanne et c'est en 1456 que commence le procès en nullité. L’historienne Colette Beaune précise que cette fois, les juges veulent prouver que Jeanne la Pucelle était pieuse, bonne chrétienne et fidèle au royaume de France. Le 7 juillet 1456, Jeanne d’Arc est acquittée.

Jeanne d’Arc face au mythe

De son vivant, Jeanne d’Arc fait déjà l’objet de récits épiques qui la présentent comme envoyée du Ciel. À sa mort, plusieurs théories circulent : est-elle vraiment décédée ? que penser de cette Claude, revenue cinq ans plus tard et qui revendique être Jeanne d’Arc ? est-elle ressuscitée ? Mais d’ailleurs, n’est-elle pas la fille cachée de roi ? est-ce réellement une femme ?

Les légendes vont bon train et si nous ne disposons d’aucun portrait la représentant, elle est pourtant l’une des figures historiques la plus dépeinte. Au XIXe siècle, à l’aube de la IIIe République, elle devient un symbole républicain fort dans le contexte de construction de la nation : elle devient tantôt fille du peuple condamnée puis brûlée par l’Église pour la gauche, tantôt héroïne nationale et sainte pour la droite.

Canonisée le 16 mai 1920, elle dispose de deux fêtes : l’une républicaine, instituée le 10 juillet 1920 et célébrée chaque deuxième dimanche de mai en souvenir de la libération d’Orléans, et l’autre catholique, fixée au 30 mai, jour anniversaire de sa mort.

Vraie Jeanne, fausse Jeanne

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