Des lieux, des communautés

Avec les vacances, le touriste se fait pèlerin en visitant des abbayes, des monastères. Mais pourquoi dit-on d’une abbaye qu’elle est bénédictine ou cistercienne ? Trouvez ici toutes les réponses avec les textes du Fr. Yves Combeau, dominicain et historien. Sa présentation des différentes familles monastiques sont illustrées par nos reportages et documentaires.

Le moine est celui qui vit seul (monos, en grec) avec Dieu, dans la contemplation et la prière. Il peut être complètement seul, mais le plus souvent, les moines vivent dans des communautés organisées pour permettre à chacun de poursuivre sa quête de Dieu. Ces communautés sont des monastères. On parle également d’abbaye si le monastère est dirigé par un abbé. En Occident, diverses familles se sont constituées au fil des siècles, avec leurs règles qui mettent l’accent sur telle ou telle dimension de la vie monastique.

Les cisterciens

Les cisterciens sont des bénédictins « réformés » au XIIe siècle par saint Etienne Harding et surtout saint Bernard à partir de l’abbaye de Cîteaux (d’où leur nom). Ils insistent sur le dépouillement matériel et esthétique, le travail manuel, souvent agricole, et le silence. Deux congrégations, dont une très majoritaire en France, la congrégation de La Trappe, qui remonte au XVIIe siècle et qui voulait être un retour à l’authenticité des débuts. Le patrimoine architectural des cisterciens est bien connu et admirable ; mais leur patrimoine spirituel n’est pas moins important.

Les bénédictins

Ils appartiennent à l’ordre fondé par saint Benoît. La communauté vit dans le silence, pratique l’étude et apporte un grand soin à la liturgie. L’abbé joue le rôle de père au sein de la communauté. Les bénédictins sont très nombreux et répartis en plusieurs congrégations ou groupements de monastères ; en France, nous possédons les congrégations de Solesmes, de La Pierre-qui-Vire et des Olivétains (du Mont-Olivet, en Italie). Ce qui les distingue est une importance plus ou moins grande accordée à tel élément de la règle de saint Benoît, liturgie, étude et enseignement, ascétisme personnel, relations avec l’extérieur… Par le prix qu’ils accordent à la beauté de de la célébration, des chants, des lieux, les bénédictins ont donné à l’Eglise un patrimoine immense ; ils ont aussi été des transmetteurs de savoir par l’étendue et la précision de leur érudition.

Les prémontrés

Cet ordre tient son nom de l’abbaye de Prémontré, dans l’Aisne. Fondé au XIe siècle, il a été le plus important des ordres de « chanoines réguliers », c’est-à-dire des religieux vivant dans des monastères mais au contact du monde, souvent avec des écoles et des paroisses. Ils sont régis par la règle de saint Augustin, qui propose les grandes lignes de la vie commune d’un groupe de prêtres associant la contemplation et l’évangélisation, précisée par des Constitutions propres à Prémontré. De nombreux ordres, monastiques ou non, emploient aussi la règle de Saint Augustin, avec leurs constitutions propres. Les prémontrés sont aujourd’hui peu nombreux en France (Mondaye, Frigolet), mais l’influence de l’ordre et des autres ordres de chanoines réguliers a été considérable dans l’histoire de l’Eglise.

Les chartreux

L’ordre a été fondé par saint Bruno dans un vallon peu accessible de la Chartreuse. La vie monastique est orientée le plus loin possible vers la vie d’ermite ; les moines pratiquent un isolement et un silence radicaux, même s’ils célèbrent ensemble dans l’église du monastère. Proche de la tradition primitive des « pères du Désert » en Syrie ou en Egypte, la vie du chartreux est sans doute la forme la plus « extrême » de vie monastique. Malgré cela, l’ordre n’a jamais modifié sa règle ni n’a eu besoin de réforme ; il est parfaitement stable depuis le XIe siècle.

Et les femmes ?

Le plus souvent, elles constituent la version féminine des grands ordres ci-dessus : bénédictines, cisterciennes. Toutefois, il faut signaler l’originalité des trois grands ordres apostoliques du milieu du moyen âge : dominicains, franciscains, carmes. Ils possèdent tous trois une branche féminine monastique : moniales dominicaines, clarisses, carmélites…

Le renouveau monastique

Au XIXe siècle et au XXe, un certain nombre de tentatives de nouveaux ordres monastiques ont fleuri. Nous connaissons ainsi les Fraternités monastiques de Jérusalem ou les moniales contemplatives de Saint-Jean. Chacune est originale, mais nous pouvons néanmoins les « classer ». Les uns se rapprochent des chanoines de Saint-Augustin (vie en ville, prédication…), les autres des chartreux (solitude radicale…).