The confessions d'Alexander Zeldin n’est pas un spectacle ordinaire, non pas seulement parce que l’auteur y met en scène l’histoire de sa propre mère, mais parce que, sans détour et sans jamais trop en dire, il nous y dévoile un cœur simple que rien ne peut contraindre dans son désir d’être elle-même.

En traversant l’espace et le temps, The confessions évoque l’histoire d’une femme - Alice - qui, avec force d’âme, ne cesse de s’émanciper, refusant résolument, voire courageusement,  les codes de la société corsetée des années 50 en Australie, mais aussi ceux des revendications libertaires des années 70 en Grande-Bretagne, quand, face aux dictats d’hommes qui se veulent supérieurs, elle cherche à préserver sa quête intérieure.

Sous le regard d’Alice au soir de sa vie, les scènes se succèdent au gré du temps qui passe, comme autant de fragments de vie laissés en suspens : bal des débutantes, rêve de jeune fille, huis-clos familial, retrouvailles amicales, déchirure conjugale, rupture consommée, années bohèmes et universitaires, intimité violentée, musée de la joie émerveillée, bibliothèque studieuse et foyer chaleureux. Face à elle-même, Alice se remémore ses rencontres, ses lassitudes, ses affrontements, ses drames et ses émerveillements.

Tout pourrait basculer dans le soap opera, mais l’art d’Alexander Zeldin sait maintenir chaque effet, geste et parole au seuil d’une intimité, sensible et forte,  jusque dans le “Non” balbutiant, puis souverain d’Alice pour exister.

Dans des décors volants, tables et chaises, du design des années 50 à celui des années 80, où prennent place et évoluent des comédiennes et des comédiens au jeu millimétré, systématiquement nuancé et souvent retenu, tout se déroule sous nos yeux, sans jamais qu’une scène ne cède au principe de démonstration. Le réel est comme saisi à la volée, offrant au spectateur un espace de non-dit où les blessures, les échecs,  les violences, les tristesses, les espérances et les joies sont autant de secrets qui, ainsi “confessés”, révèlent un cœur simple qui désire tout simplement être lui-même.

Empêchée et contrariée dans son désir d’exister au gré de ce qui transcende la réalité, Alice cherche et finit par trouver dans la figure du Pierrot de Watteau l’expression de sa quête : un arrière-pays que des espaces sociaux - quels qu’ils soient et désespérément clos sur eux-mêmes - ne cessent de saccager. 

Sans jamais trop en dire, face à son fils, jeune garçon sur scène, Alice évoque cette quête qui, parfois, avec vaillance, confine au combat : le combat du quotidien ordinaire d’une femme ordinaire, comme il en existe des milliers d’autres. La présence de ce jeune fils sur scène suscite les confidences d’Alice, à moins que ce soient les confidences de cette maman qui suscite le regard de ce même fils metteur en scène. Dans l’un ou l’autre cas, présences, regards et confidences ne sont pas sans évoquer les vers de Novalis : “la pudeur est certainement un sentiment de la profanation : amour, amitié, piété ne doivent point être traités sans mystère et l’on devrait à leur sujet se comprendre en silence.” C’est d’ailleurs après un temps de silence ému, qu’une salve d’applaudissements nourris retentit ce soir du 17 juillet à la Fabrica.

« The confessions » d’Alexander Zeldin, du 17 au 23 juillet, à 16h00 à la Fabrica. En tournée, à ne pas manquer.

Frère Thierry HUBERT o.p., frère Charles DESJOBERT o.p., et frère Rémy VALLÉJO o.p.


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Rencontre Foi & Culture 2023: « Le Beau Monde ». R. Fortin, S. Gauchet, B. Ripoche, A. Amard.