Avec 1 700 pièces dans le off et 27 400 levers de rideau dans 139 théâtres différents, pas facile de faire son marché ! Alors il y a le bouche à oreille, le coup de cœur partagé, le tract à la main persuasif. On vous livre en toute subjectivité quatre de nos découvertes !
Couleur Framboise
Nous avions découvert Mehdi Djaadi, il y a quatre ans avec son Coming out au théâtre des Corps Saints. Il y retraçait, avec un humour corrosif, son parcours humain et spirituel, l’amenant de la banlieue de Saint-Étienne aux planches parisiennes, et de sa culture musulmane à sa conversion à la foi catholique. Avec Couleur Framboise, il poursuit la narration de son parcours mais les difficultés de la vie - notamment pour devenir père - et ses questionnements existentiels - quand cohabitent dans sa tête les trois voix musulmane, catholique et athée - l'ont fait gagner en épaisseur et en vérité. L’humour procède chez Mehdi de l’élan de la résurrection. Un bien fou. Pour lui et pour nous !
Brasser de l’air et s’envoler
Xavier Guelfi nous offre une bouffée d’oxygène toute aussi “antioxydante”, quand, dans une vie, l’ambiance devient irrespirable et que l’on est confronté à l’absurdité de ses questions et de ses envies. Pour Xavier, patauger dans la vase des injonctions contradictoires de notre monde fou vire au véritable drame. Alors au lieu de brasser du vent, pourquoi ne pas tenter de prendre un peu de hauteur et pourquoi pas se rêve en sauveur du monde. Avec une insolente sympathie et le regard complice – et rêveur – des bonnes gens, Xavier s’embarque dans une lutte ubuesque et totalement burlesque avec lui-même, son pouf et une machine à laver, qui nous fait rire et rire encore franchement.
La cabane de l’architecte
Les frères dominicains – pour qui Le Corbusier édifia dans les années 1950 le couvent de La Tourette – ne pouvaient passer à côté de cette pièce qui évoque la main tendue par le célèbre architecte au jeune Robertino. Ce gamin n’est autre que Robert Rebutato (1937-2016) que le Maître prend sous son aile lorsqu’il s’installe à l'Étoile de mer où travaille l’adolescent. C’est là que Le Corbusier édifie son étonnant cabanon, cet endroit même où il meurt noyé en 1965. La pièce commémore d’ailleurs les funérailles nationales au Louvre et ce corps veillé par les dominicains, une nuit durant, à La Tourette. Le récit, plein d’anecdotes pittoresques et savoureuses, nous mène de la cabane du Corbu à la grande aventure de l’architecture moderne.
Victor Hugoat - numéro 1 du rap français
Pour déplacer un monument de la littérature française du XIXe s. en lui donnant des airs de rappeur contemporain, il faut une énergie considérable et une capacité à embarquer son public. C’est ce que réussit avec talent le comédien Barthélémy Heran, avec son Victor Hugoat, co-écrit et mis en scène par Grégoire de Chavanes. Les répliques cinglantes et drôles fusent lors de discours politiques, mais l'émotion s’infiltre aussi quand est évoquée notamment le destin tragique de Léopoldine. Derrière Hugoat, il y a aussi l’homme de lettres audacieux, bousculant le fixisme déjà à l'œuvre, et sauvant Notre-Dame de Paris. Un seul en scène généreux, une multiplicité de personnages interprétés, et une interaction ajustée entre le public classique ou romantique rendent un bel hommage à cette “légende des siècles”.
Frères Charles, Rémy, Thierry et Thomas
Crédit photo : Charles Desjobert