La première antienne Ô décrit celui qui vient comme la Sagesse. C’est cette sagesse qui vient arrêter le bras d’Abraham et qui vient établir une alliance nouvelle.

Paroles : Ô Sagesse, de la bouche du Très-Haut / toi qui régis l’univers avec force et douceur/ enseigne-nous le chemin de vérité/ Viens, Seigneur, nous enseigner le chemin de la prudence.

 

Pour cette première antienne vous remarquerez que le clavecin n’est pas utilisé, et que les chanteurs sont accompagnés par 4 flûtes à bec, de différentes tailles. C’est ce que l’on appelle un "consort" de flûtes : des flûtes de différentes tailles, toutes taillées dans le même bois. Et dont les sons se mêlent bien ensemble, donnant cette sonorité très douce et moelleuse. Cette pratique était très courante à la Renaissance. Charpentier n’a pas écrit de partie de flûtes pour cette antienne-là. Alors pourquoi en mettre ? Eh bien, vous le remarquerez peut-être, l’ensemble de ces quatre flûtes sonnent un peu comme un petit orgue. Et c’est ce que nous voulions. En effet, cette musique d’Eglise est normalement jouée sur un petit orgue avec des tuyaux en bois. On appelle cela un "positif". Mais n’ayant pas accès à un positif pour l’enregistrement, nous avons donc enregistré la plupart des antiennes avec le clavecin sur la partie de clavier. Ce qui rend très bien aussi ! Mais pour pouvoir tout de même retrouver ce son d’orgue doux, nous avons décidé de mettre à contribution 4 excellents flûtistes et réécrit la partie de clavier pour 4 flûtes. Finalement les tuyaux en bois, au lieu d’être actionnés par les touches du clavier, l’étaient par les souffles des flûtistes !

Dans cette antienne, vous pourrez noter la longue montée des chanteurs sur le mot "Altissimi" (Très Haut). 
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Marc-Antoine Charpentier est un compositeur de l’époque de Louis XIV. Sa musique ne fut pas très connue du grand public à l’époque. En effet, tout comme tous les autres musiciens de son temps, il fut complètement éclipsé par l’unique et tout puissant intendant de la musique du roi : Lully. Mais depuis la fin de la Seconde guerre mondiale sa musique a fait l’objet d’une redécouverte sans précédent. Et de nos jours, de nombreux ensembles de musique ancienne jouent et enregistrent sa musique. Certains ensembles tirent même leur nom de certaines de ses œuvres. C’est le cas bien sûr de l’ensemble "Les Arts Florissants", dirigé par William Christie. Et bien plus modestement c’est le cas des "Fous Divertissants". Pour la petite anecdote, Les Fous Divertissants est une œuvre de Raymond Poisson et musique de Marc-Antoine Charpentier, et est la toute première comédie écrite pour la Comédie française ! 

Si la musique de Marc-Antoine Charpentier plaît autant à notre époque c’est peut-être à cause de cette facilité qu’a son auteur de nous toucher droit au cœur. Avec une grande économie de moyen, mais avec des harmonies formidables et une ingéniosité sans borne, Marc-Antoine Charpentier sait donner à un texte tout le souffle de vie qui l’anime. 

C’est le cas ici avec ce « Salut de la veille des O et les 7 O suivant le romain ». Par le terme "romain" Charpentier fait ici référence à la réforme du Concile de Trente qui eut pour effet d’abandonner une huitième « O », « O virgo virginum », qui se chantait en dernier. On peut donc ainsi trouver des versions de cette antienne à la Vierge chez des compositeurs antérieurs au concile de Trente (1563), comme par exemple le grand Josquin Desprez.
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Catherine Cessac, grande spécialiste de Marc-Antoine Charpentier, présente la forme de ces "antiennes O".
Chaque antienne est structurée de la même manière : d’abord l’invication ("O Sapientia", "O Adonaï", ...) que Charpentier traite en de longues notes suspensives créant comme par magie le climat d’attente propre à l’Avent. Les voix en imitation exposent la suite du texte ; puis, sur "Veni", appel véhément à la venue du Christ, le tempo s’anime ("gai") et passe du binaire au ternaire. Les dernières mesures retrouvent l’état de repos et la gravité du début.

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