“Voici venir derrière moi celui qui est plus fort que moi”. Quelle humilité ! Connaissez-vous dans votre entourage beaucoup de personnes qui affirment aussi simplement ce que Jean Baptiste proclame ? Bien souvent, ne voulons-nous pas que ceux qui viennent après nous soient à notre hauteur, entrent dans notre vision des choses ? Certains parents ne souhaitent-ils pas que leurs enfants poursuivent ce qu’ils ont commencé ? Comme il est difficile de découvrir son seuil de compétences, ses limites, de passer la main, d’accepter que l’élève dépasse le Maître, d’écouter cette voix qui nous dit :  “Ne t’accroche pas !”, “Laisse faire” !

Accepter un commencement, voir un « ciel nouveau et une terre nouvelle » dans sa vie est un chemin parfois bien difficile à emprunter. Mais telle est la promesse que nous avons entendue aujourd’hui ! Et pour la recevoir, le prophète Isaïe nous rappelle un préalable : « Que tout ravin soit comblé, toute montagne abaissée ! ». Qu’est-ce à dire ?

Regardons la carte de notre cœur : ne faut-il pas abaisser en nous certaines prétentions, aplanir des différends ? Ne faut-il pas aussi relever ce qui peut renaître, élever un peu la voix de temps en temps ! Il s’agit d’être à la hauteur… de ce que nous sommes profondément… pour mettre les choses… à plat !

Dans le langage biblique, c’est l’expérience du désert : un lieu où on ne peut tricher. Prendre ainsi le chemin du désert, ce n’est pas déserter, fuir ses responsabilités ou être ascétique. Le désert est comme le vent de l’Esprit. Il n’est pas ce qui parle, mais ce qui nous fait parler et nous aide à donner de la voix, à être vrai, à mettre les choses à plat !

Traverser un temps de désert dans sa vie n’offre pas de réponses, mais suscite en nous des questions, car le désert est ce lieu par excellence où rien n’est tracé et où un nouveau commencement est résolument possible…

Le désert —qu’il soit pour nous solitude, lassitude, échec, maladie, déception ou séparation— nous ramène toujours à nous-mêmes, à celui ou celle que nous voulons être, mais aussi à celui ou celle dont nous ne voulons pas faire le deuil. Alors, quel que soit notre âge ou notre expérience, cherchons des routes dans nos déserts intérieurs : certains chemins nous ferons prendre de légitimes détours à cause de nos blessures. D’autres nous feront perdre du temps, vu nos maladresses ou nos peurs. D’autres chemins seront encore parsemés de tous les écueils de nos hésitations, de nos lenteurs. D’autres chemins nous sembleront par contre naturels, rassurant, familiers. Mais, avec patience, si par la parole nous mettons les choses à plat, tous ces chemins nous conduiront vers un nouveau commencement…

Pour découvrir cette extraordinaire promesse, Saint Paul nous rappelle la clé de la patience : « pour le Seigneur, un seul jour est comme mille ans, et mille ans sont comme un seul jour. Le Seigneur ne tarde pas à tenir sa promesse (…), il prend patience envers vous. ».

Prendre patience, croire en un nouveau commencement, c’est un peu redevenir comme un enfant… Non pas celui que nous avons été —comme s’il fallait revenir en arrière— mais celui qui est au fond de nous, toujours tourné vers un avenir. Car l’enfant rêve de cadeaux, de surprises, de nouveauté, de commencements. Il joue, pleure et s’émerveille face à l’immensité de la vie. Alors qu’être impatient revient à perdre son temps sans en offrir, être patient, par contre, consiste vraiment à donner de son temps… sans le perdre pour autant !

Finalement, seule la vraie patience permet d’investir en l’autre. Elle est la condition de possibilité d’un nouveau départ ! Être patient, n’est-ce pas manifester de l’empathie et de l’affection ? N’est-ce pas tracer une route pour quelqu’un, en lui laissant la liberté de la suivre ou non ?  N’est-ce pas finalement poser le regard de Dieu sur un être ? Car à tout âge les ravins du désespoir peuvent être comblés, les montagnes de nos petits égoïsmes peuvent être rabaissés.

Mais comment être patient, dans ce monde si impatient ?

En regardant vraiment le monde avec les yeux de Dieu. Avec un regard de consolation, toujours plus haut et plus profond que le nôtre.

  • Peut-être ne croyez-vous plus aujourd’hui en la capacité d’un proche, d’un membre de votre famille à avancer… La désespérance et l’impatience s’est peut-être installée. Posez sur lui le regard de Dieu, pour qui mille ans sont comme un jour. Il ne s’agit pas d’être naïf et d’ignorer les faces d’ombres de cette personne. Mais de regarder ses faces de lumière et lui parler « au cœur ». Soyez à la hauteur de ce qu’il est profondément et mettez les choses à plat. Vous y verrez un commencement !
  • Peut-être ne croyez-vous plus aujourd’hui en votre propre capacité ? Posez sur vous le regard de Celui pour qui mille ans sont comme un jour. Ne regardez pas le ravin qui doit encore être comblé, le chemin encore à faire, mais d’abord les Jean-Baptiste autour de vous. Sans que vous ne vous en rendiez compte, ces tuteurs vous préparent une route, un nouveau commencement.
  • Alors, soyons les uns pour les autres ces Jean-Baptiste, afin que tout homme, toute femme puisse être à la hauteur de ce qu’il est profondément, et ainsi accueillir la tendresse et la consolation de Dieu. Amen

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