Chers frères et sœurs, paroissiens de Châtellaillon-Plage ou fidèles téléspectateurs,
Nous pouvons être riches, pauvres ou entre les deux, nous avons au moins tous – à de rares exceptions près – un banquier à qui nous confions aveuglément notre argent.
Qu’en fait-il ? Cela nous l’ignorons ! Mais nous savons qu’il ne la met pas dans un coffre-fort, sinon nous ne toucherions pas nos intérêts, et notre patrimoine perdrait sa valeur. En effet, pendant que nous dormons, notre argent circule, est investi, placé, traverse les frontières, les fuseaux horaires, permet de construire, d’entreprendre. Bref, il fait marcher l’économie.
Cette démarche si naturelle, évidente et nécessaire dans notre vie quotidienne ne pourrait exister sans relation de confiance. Les banques ne cessent de la mettre en avant dans leur communication. Sans elle, tout s’effondre… Souvenons-nous de l’épisode cocasse des deux pences de Mickael dans Mary Poppins. 
Le métier des banquiers, des gérants (pour reprendre le mot de la parabole) c’est de s’occuper d’un argent qui ne leur appartient pas, d’en disposer, de l’investir dans telle ou telle direction.
C’est la même chose pour les disciples et leurs successeurs, les prêtres de l’Église. En effet, les uns s’occupent d’argent ; les autres ont en charge les dons de Dieu : sa miséricorde, sa grâce. « les fils de ce monde sont plus habiles entre eux que les fils de la lumière ».
Chers frères et sœurs, permettez-moi de penser que Jésus s’adresse spécialement ici aux ministres du sacrement de pénitence et de réconciliation. Oui, chers frères prêtres qui écoutez cette homélie en différé (car vous célébrez la messe maintenant), nous sommes les intendants des mystères de Dieu : nous distribuons ce qui ne nous appartient pas ! C’est ce que découvre le curé de campagne dans le roman de Bernanos, persuadé de sa médiocrité mais qui convertit la comtesse à la veille de sa mort. Il écrit : « Ô merveille qu’on puisse faire ainsi présent de ce qu’on ne possède pas soi-même. Ô doux miracle de nos mains vides ! »
Ainsi derrière le gérant malhonnête qui remet des dettes colossales (c’est bien cela, pardonner les péchés !) nous pouvons reconnaître le prêtre donnant l’absolution aux fidèles qui lui demandent pardon et qui pourtant ne lui ont rien fait ? Notre place de gérant est étonnante, chers frères prêtres ! Dieu nous demande de donner – que dis-je, de dilapider ce qui lui appartient en propre : sa miséricorde.
Vous voyez chers fidèles du Christ, chers amis téléspectateurs, nos péchés peuvent être effacées abondamment et aussitôt par les gérants des dons de Dieu, ministre du sacrement de pénitence. Ne gardons pas nos dettes comme des boulets qu’on traîne. Tout comme l’argent, la miséricorde doit circuler ; elle ne peut pas être reprise. Elle est donnée définitivement, éperdument… Cela fait la joie du Père.

Les prêtres donnent de ce dont ils ne sont pas la source, et nous tous, prêtres et fidèles laïcs, n’avons-nous pas tous en commun un trésor qui ne vient pas nous mais dont nous disposons ?
Depuis notre baptême a été versée sur nous une eau pure : Dieu a changé notre cœur de pierre en cœur de chair ; un cœur guéri, capable d’aimer. Par notre confirmation, nous avons reçu l’Esprit-Saint, le don de Dieu : nous sommes habités par l’Esprit d’amour. Et ici, aujourd'hui, nous communions au corps du Christ, sacrement de l’amour. Nous pouvons prier le Seigneur de venir aimer en nous quand nous nous en sentons incapables, spécialement pour nos ennemis. Ces trois sacrements font de nous des réceptacles de l’amour.
Alors, chers amis, ne gardons pas l’amour divin pour nous-mêmes, ou seulement pour les nôtres ! Nous serions comme ces banquiers incompétents et peureux qui enferment l’argent dans un coffre, rejoignant ainsi l’attitude du serviteur mauvais enfouissant son talent dans la terre. Si nous gardons cet amour pour nous, il va s’étouffer, disparaître.
L’amour – comme l’argent - est fait pour circuler ! Dieu l’a placé en nous pour que nous le donnions : c’est la seule manière de ne pas le perdre. J’aime rappeler une phrase entendue du père Guy Gilbert, né non loin d’ici à Rochefort dans une famille de 15 enfants. Il demandait à sa mère : « Comment as-tu fait pour diviser ton amour équitablement entre nous tous ? »… « je ne l’ai pas divisé, répondit Mme. Gilbert, je l’ai multiplié ».
Chers frères et sœurs, ouvrons les coffres-forts de nos cœurs égoïstes ; libérons la miséricorde 70 fois 7 fois ; dilapidons l’amour divin : il ne nous appartient pas. Il nous a été donné, pour que nous le donnions.
Amen.

Retrouvez le texte de l'homélie ICI.

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